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Les services juridiques





Texte de la plaidoirie de Maître Corbeil (suite et fin)




CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL C O U R      MUNICIPALE

                                                                       _________________________________

NO: 199 125 329

                                                                       LA REINE

                                                                      

                                                                       c.

 

                                                                       DENIS CHESNEL ET AL

                                                                        

                                                                       _________________________________

 

ANALYSE DE LA PREUVE TESTIMONIALE PAR ME BERNARD CORBEIL SOUMISE À L’HONORABLE JUGE DENIS BOISVERT DE LA COUR MUNICIPALE DE MONTRÉAL

 

INTRODUCTION

 

1.                 Le présent document fait partie d’un ensemble de trois documents qui constituent la plaidoirie présentée par Me Bernard Corbeil.

2.                 Dans le premier document intitulé « Plaidoirie » nous avons analysé les pièces et dans le deuxième document, intitulé « Normes » nous avons répondu à la question du tribunal qui demandait comment déterminer les paramètres d’un club échangiste authentique afin de s'assurer qu'il soit fréquenté par d'authentiques adeptes de l'échangisme.

3.                 Dans ce troisième document, nous analyserons la preuve testimoniale en donnant la date et la page du cahier de transcription à laquelle se trouve le sujet traité.

4.                 Nous analyserons d'abord certains témoins de la poursuite, puis ceux de la défense. Toutefois, l'analyse de certains témoins de la poursuite sera particulièrement courte car ils n'ajoutent pas beaucoup de choses à la preuve documentaire que nous avons déjà analysée.

HÉLÈNE FISET LE 12 FÉVRIER 2002

 

5.                 Le témoignage de la policière Hélène Fiset les 12, 13, 14, 15 février 2002, 25 et 27 mars 2002 a plutôt consisté à verbaliser le contenu des  pièces produites.

6.                 L'autre facteur qui contribue à cette absence d'éléments nouveaux vient des longues périodes de projections de vidéos qui ont montré de longs ébats sexuels qui n'ont jamais été niés et qui tendent à démontrer que les échangistes qui ont été filmés à leur insu, donc dans leurs comportements authentiques, harmonieux et respectueux, agissent hors de la vue du public qui ne veut pas voir ou participer.

7.                 Par contre, certaines parties de son témoignage révèlent des faiblesses sur le fond des accusations et sur la crédibilité.

8.                 Comme exemple, sur le fond des accusations le tribunal peut constater que la policière n'a aucune base objective, comme une directive administrative ou des paramètres d'intervention, pour déterminer le caractère raisonnable de ses motifs de croire qu'il y avait commission de crime.

9.                 Comme exemple sur la crédibilité le tribunal peut constater que lorsqu'on lui demande ses notes personnelles d'enquête qui ont servies à rédiger son rapport P-1 elle dit qu'elle les avait "détruites", alors que dans sa formation de policier enquêteur on lui a appris qu'elle devait les garder pour témoigner tel qu'il appert aux pages 126 et 127:

9.1             " Les notes personnelles, non, ce qu'on fait, c'est que … oui, il y en a eues. Lorsqu'on arrive au bureau, on les a faits rapidement, mais on les a pas gardées malheureusement, je pourrais pas vous dire.

9.2            

9.3             Que vous n'avez pas gardées ?

9.4             Non, malheureusement.

9.5             Détruites ?

9.6             Oui."

10.             Comment ça "Malheureusement" comme si il était arrivé un accident ?

11.             "Malheureusement" pour qui ?

12.             Pour les accusés qui ont l'impression qu'on leur cache quelque chose ?

13.             Pour les accusés qui sont privés de leur droit à une défense pleine et entière en ayant pas accès à des documents originaux ?

14.             Pour la policière qui perd de la crédibilité parce qu'elle est mal à l'aise de devoir se justifier d'avoir détruit des éléments de preuve contrairement à ce qu'on lui a enseigné lors de sa formation comme policière ?

15.             Pour la justice qui doit être rendue selon la vérité, seulement la vérité et toute la vérité ?

16.             Le tribunal est en droit de s'étonner qu'il est impossible que la justice puisse vérifier si le rapport P-1, rédigé quatre jours plus tard ( soit en date du 26 pour des observations faites le 22,) est une reconstitution de mémoire ou une rédaction fidèle des notes personnelles contemporaines.    

17.             En témoignant avec des rapport informatiques rédigés en date du 26 pour des observations qu'elle a faites quatre jours auparavant, elle enfreint son devoir et manque de respect aux accusés qui sont ainsi privés de leur droit d'avoir accès aux documents originaux.

18.             Le témoin Fiset accompagnait le policier qui filmait et par conséquent elle ne pouvaient pas prendre de notes ouvertement comme dans le cas d'un enquêteur qui écrit en même temps qu'il parle avec des témoins ou qu'il visite un endroit en se promenant avec son calepin et son crayon.

19.             Comme le témoin Fiset pouvait difficilement prendre des notes en se promenant sur les lieux, le tribunal doit de se demander dans quelle mesure P-1 et les autres rapports rédigés plusieurs jours plus tard ne sont pas des reconstitutions bonifiées des notes personnelles originales afin de donner à la cour une impression de crédibilité grâce aux très grandes précisions et détails qui font que les rapports de police ressemblent d'avantage à des romans feuilletons minutieusement rédigés plutôt que de ressembler à des notes rédigées en vitesse avec les faiblesses de fiabilité et de crédibilité qui sont inévitables. 

20.             Ce manque de rigueur fait partie de l'attitude générale des policiers qui ne semble pas s'être souciés du fait que dans le cadre d'accusations de maison de débauche, il faut pendre en considération les normes de tolérance de la société canadienne et contemporaine.

21.             Nulle part dans la preuve de la poursuite, il n'a été établi ce qui avait été fait pour vérifier en quoi cette norme était outrepassée par les activités qui se sont déroulés à leur connaissance pendant les 21 mois précédents la perquisition de novembre 1999.

22.             Le sens que le tribunal doit accorder à ce genre de faits et de comportements des policiers, ce n'est pas d'y trouver un fondement d'abandon des procédures, mais d'y trouver une faiblesse au niveau du fardeau de preuve qui doit être fait hors de tout doute raisonnable. Si, au niveau de leur enquête, les policiers ne sont pas capables d'identifier les critères pour identifier les éléments essentiels de l'accusation, il s'ensuit que la preuve de la poursuite ne peut pas faire autrement que d'être incomplète et fragile.

23.             En faisant une enquête sans recueillir la preuve nécessaire et en portant des accusations, les policiers imposent le fardeau aux accusés de venir démontrer qu'ils n'outrepassent pas le seuil de tolérance de la société.

24.             Le témoin Fiset porte des jugements concernant le non usage de condoms, mais elle ignore si les couples sont de véritables couples et si leur convention de couple c'est d'utiliser le condom seulement lors de relations hors couple. (page 170)

HÉLÈNE FISET Le 14 FÉVRIER 2002

 

25.             De la page 74 à la page 77 le témoin Fiset établit que lors de ses observations, les gens présents étaient respectueux, d'une "approche douce", repartaient "doucement", "normalement insistent pas" et acceptaient le refus des autres.

26.             Le tribunal est en mesure de conclure que les gens présents chez Brigitte et Michel avaient donc un comportement respectueux comme celui des adeptes de l'échangisme dont l'expert Campbell parle.

27.             Ce qui permet au tribunal de conclure que les gens qui se rencontraient chez Brigitte et Michel semblaient véritablement exercer leur droit à la liberté d'association, de conscience, de pensée, de croyance, d'opinion, d'expression, de réunion, conformément à la Charte des Droits et Libertés et sans discrimination quant à leurs pratiques sexuelles.

28.             Le témoin Fiset n'y a remarqué aucune drogue (page 99), "aucune bagarre ni de chicane" (page 102) et l'endroit était "pacifique" et "tranquille" (page 102), les "gens quittaient quand ils le voulait" (page 103),  qu'il fallait faire "la réservation par téléphone" (page 103), l'argent donnée à la réception "C'était un droit de passage", donc l'argent n'était pas donné pour des faveurs sexuelles, et elle n'a  "pas été obligée à faire quoi que ce soit" (page 119), et elle n'a ni vu ni entendu quiconque se plaindre sur les lieux (page 126).

29.             À la page 134 le témoin Fiset admet que "C'est possible qu'il y ait eu utilisation de condoms …".

30.             À la page 138 elle admet que seulement 25 % à 30% des gens allaient jusqu'à la pénétration, de sorte que le juge est bien fondé de conclure que ce qui se passait chez Brigitte est très loin d'une pratique d'orgies avec ses excès du genre "free for all" et sans respect.

31.             Tous ces éléments de la preuve de la poursuite permettent au tribunal de conclure que selon toute vraisemblance ces comportements correspondent fortement avec celui des authentiques échangistes qui se rencontrent entre adultes avertis et consentants, dans un endroit qui leur est réservé pour voir ou avoir des relations sexuelles en groupes, à l'abri des regards du public qui ne veut pas voir ou participer.

 

 

 

HÉLÈNE FISET LE 15 FÉVRIER 2002

 

32.             Un des problèmes majeurs dans les dossiers de maison de débauche vient du fait que le code criminel ne donne pas une définition complète et statique de ce qui constitue un acte indécent.

33.             Comme pour compliquer la situation, la jurisprudence de la Cour Suprême du Canada est venue dire que pour qu'un acte soit indécent, il faut qu'il outrepasse le seuil de tolérance de la société canadienne et contemporaine et que, non seulement cette norme évolue, mais en plus tout dépend des circonstances et du contexte.

34.             Tout en compliquant la situation, la Cour Suprême agit avec une très grande sagesse et équité car elle permet de rendre des jugements qui tiennent compte de l'évolution des mœurs qui se fait parfois très rapidement, surtout pour un sujet aussi sensible que le sexe et les orientations sexuelles des gens.

35.             Ces prémisses sont utiles à souligner, pour que le tribunal puisse toujours avoir présent à l'esprit que les accusations de maison se débauche sont très différentes des autres accusations contenues dans le code criminel canadien et qu'elles nécessitent une connaissance nuancée et approfondie de multiples notions.

36.             Cette approche ne semble toutefois pas partagée par les policiers de l'escouade de la moralité qui ont une approche tout à fait différente si on se fie au témoignage de la policière Fiset à la page 21 lorsqu'elle déclare :

36.1        " … on est des spécialistes en moralité. Donc, on sait ce qu'est une maison de débauche"

37.             Il semble que selon cette "auto évaluation", les policiers de l'escouade de la moralité ont une haute estime d'eux-mêmes en s'appropriant le titre de "spécialistes" alors qu'aucune preuve n'a été faite que ces policiers ont une formation particulière en sexologie, en psychologie, en sociologie, en sondage d'opinions publiques.

38.             L'approche des policiers de l'escouade semble consister à dire: "Nous autres on connaît ça et c'est nous autres qui décidons de la moralité des autres selon nos critères."

39.             En partant, cette attitude subjective et intransigeante est contraire aux nuances de la jurisprudence qui exige des critères objectifs et une attitude de tolérance.

40.             De plus, cette attitude ressemble d'avantage à un relent du dogmatisme religieux d'une époque révolue où les autorités se croyaient détenteur de la vérité universelle. Cette attitude ressemble à celle du temps où le pape a emprisonné Galilée pendant 10 ans parce qu'il prétendait que la terre tournait autour du soleil alors que l'autorité religieuse prêchait que c'était le soleil qui tournait autour de la Terre créée par Dieu comme centre de l'univers.

41.             Ou encore, on se penserait au temps des accusations portées dans les années 60 contre des danseuses africaines qui dansaient les seins nus à la Place des Arts et qui avaient été accusées d'actes indécents parce que le chef de police a dit que "tout ce qui bouge est indécent".

42.             Il est étonnant de constater que lorsque on lui demande d'indiquer au tribunal quels sont les critères de l'escouade de la moralité pour déterminer s'il s'agit d'une maison de débauche, la policière Fiset qui se déclare "spécialiste en maison de débauche" demeure hésitante, vague et subjective tel qu'il appert aux pages 24 à 27:

42.1        " La notion de maison de débauche, c'est un endroit particulier où on peut... où on doit déterminer qu'il y a des actes... de la prostitution ou des actes indécents qui se passent à l'intérieur, à un endroit où on doit déterminer des fréquences pour, justement, déterminer la fréquence des actes qui se produisent à l'intérieur.  En gros, grosso modo, c'est ce que je vous dirais.

42.2        Est-ce qu'il y a d'autres choses que vous pouvez ajouter pour compléter?

42.3        Bien, il y a un paquet de détails là-dessus, mais grosso modo, c'est ce que je vous dirais, là.

42.4        Q40 Allez dans les détails.

42.5       

42.6        R Bien, qu'on doit déterminer, au niveau des... qu'il y a comme un genre d'échange d'argent.  Mon Dieu, attendez un peu, là.  (inaudible).

42.7       

42.8        R Souvent, on est préparé.  Maison de débauche.  Bien, en gros c'est ça la maison de débauche.  Après, c'est sûr qu'il y a les choses au niveau des tenanciers, de tout ce qui est relié alentour de ça.  Mais la maison de débauche, c'est vraiment un endroit où on détermine... où on doit déterminer qu'il y a des actes indécents ou de la prostitution et déterminer les fréquences pour le prouver, à ce moment-là.

42.9       

42.10    Q43 Bon.  Est-ce que ces critères-là sont écrits quelque part dans un manuel de formation ou de gestion des dossiers de maison de débauche?

42.11    R Ce serait dans le Code criminel, en partie.

42.12    Q44 Mais je parle au Service de police, est-ce que vous avez une directive, un document de travail, appelez ça comme vous voudrez.  Je ne parle pas de la loi, je ne parle pas du Code criminel, je parle de vous autres, à la Moralité, quand vous avez dit tantôt:  "Nous, on sait c'est quoi une maison de débauche.  Comme si, eux autres, le rapport général, ils ont une notion différen­te, peut-être."

42.13    Alors, je vous demande, est-ce que oui ou non il y a un document qui existe à la Moralité décrivant ce que vous devez considérer comme critère pour déterminer qu'il y a une maison de débauche ou non?

42.14    R Non, on travaille avec les lois, donc on travaille avec le Code criminel.  Il y a pas de procédure interne qui vient pallier le Code criminel.  On travaille avec le Code criminel tout simplement.

42.15    Q45 Donc, il n'y a pas de directive interne, il n'y a pas de document interne, là, qui confirme ce que vous venez d'affirmer verbalement concernant les critères de dire, il y a un endroit où des actes indécents, de la prosti­tution, regarder la fréquence, échange d'argent.  Ça n'existe pas, ça, chez vous?

42.16    R Bien, s'il en existe, moi, je la connais pas.  Je veux juste confirmer ma réponse en tant que telle, c'est qu'on n'a pas d'écrit ou quoi que ce soit qui dit que : numéro 1, on doit qualifier ça; numéro 2, on doit vérifier ça; numéro 3, on doit vérifier ça.  Il y a pas de procédure à suivre.  C'est l'expérience du policier avec les lois qui sont là qui fait qu'on déroule l'enquête, qu'on continue avec l'information en tant que telle.

42.17    Et je vous dirais même que je vous parle en tant que, person­nellement, en tant qu'enquê­teur, je peux pas dé-terminer... un autre enquêteur qui vient d'arriver pourrait peut-être pas nécessairement... aurait des notions un petit peu, pas différentes, mais moins élaborées à ce sujet-là.

42.18    Donc, c'est pas... la notion de base d'enquête reste la même avec les mêmes lois, mais c'est l'expérience qui fait que, à un moment donné, on amène plus de... "

43.             Donc la définition d'une maison de débauche demeure pour les policiers quelque chose qui dépend de l'expérience subjective de l'enquêteur et nul part ils ne prennent en considération le seuil de tolérance de la société canadienne.

44.             Nulle part les policiers de l'escouade de la moralité n'ont une définition objective et uniforme et nulle part ils n'ont dit qu'ils prenaient en considération le seuil de tolérance de la société canadienne et contemporaine.

45.             Donc dans le présent dossier, les policiers n'ont jamais pris en considération la norme de tolérance de la société canadienne et contemporaine et c'est ce qui explique pourquoi la poursuite n'en a jamais fait la preuve.

46.             La conclusion que le tribunal est bien fondé de tirer, c'est que si les policiers ne sont pas capables de donner une définition conformément à la jurisprudence:

46.1        d'une part les policiers sont dans l'impossibilité de faire une enquête pertinente et complète car ils ne savent pas ce qui est toléré dans la société canadienne et contemporaine;

46.2        et d'autre part les policiers qui n'ont pas enquêté sur la tolérance dans la société canadienne et contemporaine sont dans l'impossibilité de faire la preuve de cet élément essentiel hors de tout doute raisonnable et par conséquent la preuve est insuffisante pour déclarer les accusés coupables de quelque chose qui n'a pas été mis en preuve.

47.             À la page 30 le témoin Fiset témoigne à l'effet que "… suite à la plainte du maire  on est allé rechercher les plaintes qu'on avait déjà eues,…".

48.             Le tribunal est donc bien fondé de conclure que c'est la plainte du maire le 16 juillet 1999 (P-6.1) qui a réactivé le dossier que les policiers avaient suspendu le  1 juin 1998 (D-2) à cause d'un "vide juridique".

49.             Toutefois, le 16 juillet 1999  ce "vide juridique" existait toujours et il existe toujours car aucun tribunal canadien n'a eu l'occasion avant aujourd'hui de prendre connaissance d'un sondage sur la tolérance de la société canadienne et contemporaine face aux clubs échangistes.

HÉLÈNE FISET LE 25 MARS 2002

 

50.             À la page 28 le témoin Fiset établit qu'il n'y a eu aucun remise d'argent en échange de faveurs sexuelles et que les gens n'étaient pas forcés.

51.             Donc le tribunal est bien fondé de conclure qu'il n'y avait aucune prostitution et que les gens présents étaient consentants.

52.             Le tribunal doit en conclure que le débat se limite à savoir si la preuve démontre que ce qui se passait chez Brigitte et Michel constituent des actes indécents qui outrepassent le seuil de tolérance de la société canadienne et contemporaine.

53.             Malgré que le non usage du condom semble être un élément très important pour le témoin Fiset qui en a parlé à plusieurs reprises de "mémoire" (page 37) , elle n'a indiqué ce fait une seule fois dans ses rapports (page 45 question 88) et elle admet qu'il y a beaucoup de choses qui se passent et qu'elle ne voit pas (page 51 question 125).

54.             Ou bien cet élément est important et les rapports sont déficients ou non probants ou alors c'est élément n'est pas important et alors il est peu crédible que le témoin Fiset puisse vraiment s'en souvenir de "mémoire" 3 ans après.

55.             Par conséquent, le tribunal est bien fondé de conclure que la preuve de la poursuite est plutôt chancelante et peu crédible à ce sujet et que tout argument qu'elle voudrait en tiré est tout autant chancelante et laisse planer un doute raisonnable, d'autant plus que certaines photos prises pas les policiers établissent la présence de condoms et que Brigitte Chesnel viendra établir leur usage et le fait qu'elle en fournissait au besoin.

56.             C'est à la page 55 que le témoin Fiset admet qu'elle a détruit les notes originales qui ont servi à la rédaction de ses rapports et qu'en faisant cela, elle contrevenait à ce qui lui avait été enseigné lors de sa formation:

56.1        Q1 O.K.  Ça, c'est des notes que vous n'avez pas gardées, vous avez détruit ces notes-là?

56.2        R C'est ça.

56.3        Q2 Vous vous êtes servi de ces notes-là pour rédiger votre rapport?

56.4        R Oui.

56.5        Q3 Le sept (7) septembre et vous avez disposé de vos notes; c'est ça?

56.6        R C'est ça.  Est-ce que c'est ce qu'on vous enseigne à faire dans la formation du policier de ne pas garder vos notes et de les jeter ou c'est une initiative personnel­le?

56.7        R C'est une initiative personnelle.

56.8        Q4 Mais dans les cours de formation, est-ce qu'on ne vous mentionne pas, effectivement, que c'est préférable de garder les notes originales pour qu'on puisse vérifier?

56.9        R Vous avez raison."

57.             La preuve établit donc que les policiers sont à la fois subjectifs et se fient sur leur expérience personnelle pour déterminer qu'il y a des actes indécents qui outrepassent la norme de tolérance de la société canadienne et contemporaine et les policiers s'arrogent le droit de détruire des éléments de preuve contrairement aux normes établies lors de leur formation.

58.             Le tribunal est bien fondé de s'étonner que, des policiers qui s'auto qualifient  pourtant de "spécialistes", agissent comme bon leur semble face aux éléments de preuve et ce manque de rigueur ne peut qu'affecter leur crédibilité.

59.             La policière Fiset fait grand état du fait qu'il y a eu une éjaculation dans le bain tourbillon mais là encore, elle n'a aucune base objective ou scientifique pour en établir la pertinence et la force probante car elle admet que "C'est vraiment personnel" (page 56 question 150).

60.             Donc le tribunal est en mesure de constater que ce que les policiers tentent de faire, c'est d'imposer à la société canadienne et contemporaine, ce qu'ils pensent et ne tolèrent pas personnellement, sans égard au seuil de tolérance de la société canadienne et contemporaine.

61.             Le tribunal est bien fondé de conclure que si les juges ne doivent pas juger une cause de maison de débauche en se basant sur leurs convictions personnelles, il en est de même pour les policiers qui ont le fardeau de faire la preuve de critères autres que leurs critères personnels s'ils veulent faire une preuve objective, contemporaine, canadienne et hors de tout doute raisonnable.

62.             Ni les policiers ni le tribunal ne sont là pour conclure en fonction de leurs goûts personnels et subjectifs.

63.             Les policiers et le tribunal sont au service de la société pour assurer la paix publique en respectant les droits et les libertés des citoyens tel que garantis par la Charte des Droits et des Libertés et respectant la présomption d'innocence que l'on a trop souvent tendance à oublier.

64.             Le tribunal est aussi bien fondé de conclure que c'est parce que les policiers ont cette attitude, qu'ils n'ont fait aucune démarche pour comprendre la composante "club échangiste"  et ce que celle-ci pouvait apporter comme différence dans une enquête de maison de débauche. (page 75 et 76)

65.             La preuve a également révélé que les policiers s'arrogent le droit de prendre des photos de citoyens accusés de s'être trouvés dans une maison de débauche, ce qui constitue une simple infraction sommaire qui ne permet pas la prise de photos en vertu de la loi sur l'identification des criminels (L. R. C. ch.I-1).

66.             En effet, l'article 2 de cette loi ne permet la prise de photographies et  d'empreintes digitales uniquement  dans le cas d'accusation d'actes criminels en vertu du code criminel et de certaines autres lois non applicables dans le cas des présents accusés.

67.             C'est donc dire que dans le cas des défendeurs qui sont uniquement accusés de s'être trouvés dans une maison de débauche, ce qui ne constitue pas un acte criminel mais une simple infraction sommaire (contrairement à ceux qui sont  accusés de tenir une maison de débauche), toutes les photographies prises par la police l'ont été illégalement.

68.             Encore une fois le tribunal est en mesure de constater que les policiers prennent des initiatives personnelles selon leurs critères subjectifs, sans égard aux lois qu'ils ont pourtant le devoir de faire respecter et de respecter eux-mêmes.

69.             Il peut paraître à première vu inoffensif et sans conséquence que des photographies soient ainsi prises mais en réalité c'est extrêmement grave et inquiétant.

70.             En effet, si les policiers peuvent ainsi se constituer une banque d'images de citoyens en parallèle à ce que la loi sur l'identification des criminels permet, comment les tribunaux peuvent-ils protéger les citoyens contre les abus d'autorité et s'assurer que les droits fondamentaux garantis par la Charte des droits et libertés soient respectés ?

71.             Un autre exemple de ce genre d'attitude, c'est la prise d'un vidéo qui n'a jamais été communiqué à la défense ni produit en preuve et qui a été découvert par hasard parce qu'on voit un policier avec une caméra vidéo dont l'usage n'a jamais été autorisé par un mandat émis par le tribunal.

72.             Ces éléments sont soumis pour démontrer l'attitude autoritaire et unilatérale des policiers qui font bien ce qu'ils veulent dans leur enquête et qui ont la même approche en voulant imposer leur volonté et leur niveau d'intolérance en matière de sexualité.

73.             Le tribunal est donc justifier de conclure que la crédibilité des policiers en souffre car on voit qu'ils ne cherchent qu'à avoir raison et à donner tort, sans égard à la recherche de la justice et du respect des règles qu'ils doivent eux-mêmes respecter s'ils veulent se permettent d'accuser les autres de ne pas respecter la loi.

74.             D'autre part, que ces défendeurs qui ne sont accusés que d'infractions sommaires soient acquittés ou trouvés coupables, ils sont en droit de s'assurer que ces photographies et images qui ont été prises sans autorisation d'un tribunal soient détruites.

75.             Un argument qui illustre comment il est important que les policiers ne puissent prendre des images des accusés uniquement en respectant la Loi sur l'identification des criminels, c'est le problème de la destruction de ces images quand l'accusé est acquitté.

76.             Dans un tel cas, la Loi sur le casier judiciaire et la Loi sur l'identification des criminels prévoient des mécanismes de conservation et de destruction, alors que ces photos et images prises sans autorisation d'un juge ou sans fondement législatif, peuvent être conservées et utilisées par la polices indéfiniment.

77.             Les citoyens ont le droit à la protection de leur image et de savoir que les tribunaux puissent les protéger contre les abus des policiers qui doivent respecter les citoyens.

78.             La meilleure façon pour les accusés d'être certains que ces images soient réellement détruites c'est que le tribunal ordonne aux policiers et aux avocats de la poursuite, de remettre aux avocats des accusés qui verront à le donner aux accusés pour fin de destruction, les originaux des négatifs (ou de tout autre forme technologique équivalente de la captation de ces images) ainsi que toutes les copies.

79.             Par conséquent, le tribunal est bien fondé d'ordonner aux policiers et à la poursuite d'agir en conséquence.

80.             La destruction de ces images et photographies ne change rien au reste de la preuve et au débat de fond dont le tribunal est saisi, mais, au moins, cette partie du dommage sera réparée.

HÉLÈNE FISET LE 27 MARS 2002

 

81.             Toute la pertinence de ces questions de comportement et de non respect des lois par les policiers dont il est question à la fin des transcriptions du 25 mars 2002 et au début des transcriptions du 27 mars 2002, est précisément ce que la Cour a résumé de la façon suivante à la page 51:

81.1        " Mais la pertinence est plaidée, si j'ai bien compris, là, parce que vous cherchez que c'était... moi, la compréhension des arguments de la Défense que je comprends, c'est la pertinence qui va être importante, parce que vous aurez à évaluer la force probante de son témoigna­ge.

81.2        Or, si vous avez devant vous la policière qui, exemple, malgré sa compréhension de la loi, disons qu'elle n'avait pas le droit de le faire, disons que c'est ça, là, sa compréhension je n'ai pas le droit, mais je le fais.

81.3        Et si c'était prouvé, donc que son état d'esprit à elle était biaisé, faites attention quand ce même témoin-là va venir vous rapporter des faits directs sur les éléments essentiels de la preuve.

81.4        En ce sens-là, ça pourrait entacher ou colorer sa crédibilité qui, elle, va aller directement à la force probante, donc la force de conviction de son témoignage, en ce sens-là, d'une part."

82.             À la page 102 le témoin Fiset confirme que c'est bien la lettre du maire qui a entraîné la reprise de l'enquête suspendue en 1998 à cause du vide juridique:

82.1        " Et c'est lorsque la lettre du maire est arrivée, que, à ce moment-là, moi, j'ai repris l'enquête."

83.             Le tribunal est donc justifier de conclure que les policiers ont finalement agi en 1999 tout simplement à la suite d'une intervention politique et non pas parce que le "vide juridique" avait été comblé, ce qui affecte également leur crédibilité dans le même sens que ce qui a été dit au sujet des photographies prises sans autorisation d'un juge et de la caméra utilisée pour filmer sans autorisation.

84.             À la page 115, la policière Fiset amplifie l'incertitude des décisions de la police en matière de maison de débauche et la volatilité du "vide juridique" de D-2, en parlant de "zones grises":

84.1        " Parce que, au niveau de la Moralité, on doit toujours vérifier parce que c'est toujours... on est souvent dans une zone grise, alors on doit toujours demander avis, si vous voulez."

85.             Le tribunal doit donc se demander comment il peut imposer aux accusés de venir remplir ce "vide juridique" et préciser ces "zones grises" qui soulèvent déjà un doute dans la tête de la poursuite, sans pour autant imposer en même temps le fardeau de la preuve aux accusés qui sont présumés innocents jusqu'à preuve du contraire hors de tout doute raisonnable.

86.             La défense soumet qu'il serait effectivement illégal d'inverser ainsi le fardeau de la preuve et qu'à défaut de pouvoir conclure que la poursuite a fait une preuve hors de tout doute raisonnable, le tribunal doit acquitter les accusés qui sont victimes de ces incertitudes juridiques.

87.             À la page 142, le témoin Fiset établit que la porte était verrouillée sur la rue Rosemont et accentue le caractère privé des lieux que la défense plaide:

87.1        " Bien, écoutez, si je confirme que la porte est verrouillée, c'est que c'est nous-même, on a essayé d'ouvrir la porte, à ce moment-là, puis on n'a pas pu entrer, là." (page 142)

TONY GALLANT LE 28 MARS 2002

 

88.             Le policier Gallant ne vient pas ajouter grand chose à la preuve quant à la rue London où il a participé à l'enquête

89.             À la page 125, il établit que les échangistes présents sont de simples badauds , "une population normale qui provenait de plusieurs sources".

90.             À la page 127 il établit le caractère privé des lieux en disant " fallait qu'ils sonnent" pour pouvoir entrer.

91.             À la page 150 il corrobore que les gens devaient toujours faire une réservation.

ISABELLE LAMBERT LE 10 AVRIL 2002

 

92.             Aux pages 162 et 164, le témoin Lambert ne vient pas ajouter grand chose à la preuve de la poursuite et elle affaiblit même cette preuve en confirmant l'usage à l'effet que, les policiers indiquent dans leur dossier, le qualificatif "maison de débauche" quand ils considèrent personnellement et subjectivement qu'il y a un acte indécent, sans égard aux normes de tolérance de la société canadienne contemporaine:

92.1        " Alors, là-dedans, une fellation, pour moi, à côté de gens que je connais pas, c'est un acte indécent.  C'est pas dans mes mœurs, c'est pas dans ma mentalité d'aller faire des relations sexuelles, complètes ou non, devant d'autres personnes."(162)

92.2        Action indécente, c'est qu'est-ce que tu fais avec d'autre monde, pour moi, c'est indécent.  De faire ça devant tout le monde, c'est indécent. C'est la percep­tion que j'ai, moi.  C'est pas dans mes mœurs puis c'est indécent de faire ça, des actes sexuels devant tout le monde, là."

93.             À la page 177 elle corrobore le fait que les gens étaient respectueux.

ISABELLE LAMBERT LE 12 AVRIL 2002

 

94.             À la page 87, le témoin Lambert illustre bien que les policiers de l'escouade de la moralité ne sont pas au diapason de la majorité de la population qui tolère l'échangisme et que la notion d'acte indécent est plutôt conservatrice avec un couple typique qui se restreint à des relations sexuelles plus traditionnelles:

94.1        " O.K. alors, quand vous dites minoucher, qu'est-ce que vous voulez qu'on comprenne par cette expression-là?

94.2        R Bien, se minoucher, c'est toucher quelqu'un d'autre, là, c'est le corps.

94.3        Q5 Et, pour vous, c'est indécent, c'est parce que c'est de le faire devant quelqu'un d'autre que ça devient indécent?

94.4        R Bien, se minoucher seule avec son conjoint à la maison, c'est correct.  Se minoucher devant plusieurs mondes, c'est un peu moins correct.

94.5        Q6 Un peu moins correct?

94.6        R Bien, pas mal moins correct, oui.

94.7        Q7 O.K. et donc, si je comprends bien, ça dépend de l'endroit, selon vous?  À la maison c'est correct mais, si ce n'est pas à la maison avec...

94.8        R C'est comme j'ai expliqué, dans un endroit public où tu as des gens inconnus, non.

94.9        Q8 O.K.  Donc, ça dépend des circonstances, vous êtes d'accord avec ça?

94.10    R Bien, ça dépend, c'est ça, ça dépend de où ça se passe.

94.11    Q9 Ça dépend de où ça se passe?

94.12    R C'est ça.

94.13    Q10 Est-ce que c'est le seul critère que vous prenez en con-sidération, vous, pour apprécier ça?

94.14    R Bien, c'est où ça se passe puis minoucher, si on peut dire minoucher le conjoint d'un autre couple qu'on connaît pas, ça en est un autre aussi.  Minoucher un autre couple, ça en est un autre."

95.             Bien entendu, le témoin Lambert a droit au respect de sa perception et elle n'est sûrement pas la seule à penser ainsi.

96.             La défense respecte les choix intimes de chaque témoin en matière de sexualité et tout ce que les accusés demandent, c'est qu'on respecte aussi leur liberté de choix tout simplement en vertu de la Charte des Droits et Libertés. C'est ça la démocratie, mais elle doit aller dans les deux sens et pour tous.

BRIGITTE CHESNEL LE 23 MAI 2002

 

97.             Le 23 mai 2002, Brigitte Chesnel a témoigné pour raconter comment elle en est venue à s'intéresser à l'échangisme avec son conjoint après avoir découvert et fréquenté un autre club échangiste, avant de penser à ouvrir son propre établissement ( page 8 ) dans un local vide qui appartient à son père Denis, de qui elle a emprunté quelques 130 000 $. (pages 8 et 9)

98.             Elle a choisi de se faire discrète puisqu'elle n'a mis aucune enseigne à l'extérieur et que les murs extérieurs étaient simplement noirs.

99.             Elle n'est pas entrée dans ses frais pour les nombreuses et variées dépenses encourues (page 14 ) et les documents comptables qui ont été produits ne démontrent apparemment aucun profit.

100.        Dans sa conception, dans ses communications et en réalité, Brigitte Chesnel établit qu'elle organisait des "soirées privées pour gens libérés" (page 19) la porte était barrée et les gens devaient sonner. (page 22 pour London)

101.        De la page 24 à 33 Brigitte Chesnel met en preuve les différents moyens pris pour assurer l'hygiène et la propreté des lieux et des gens, incluant la fourniture de condoms au besoin:

101.1    "O.K.  Pourquoi qu'il y avait pas de distributrice parce que le but, c'était pas de vendre des condoms, le but, c'était de dépanner les gens.  Pourquoi que j'avais... qu'au moment... pourquoi qu'ils étaient pas sur les tables ou qu'ils étaient pas au niveau des chambres, les condoms, c'est parce que les gens les mettaient tous dans leur sacoche puis j'en n'avais plus.  Fait que je les gardais en arrière du bar, c'est pour ça. (page 24)

101.2   

101.3    ... il y avait les règlements d'hygiène qui étaient toujours de prendre une douche avant de rentrer dans le spa, c'était très important, c'était six (6) personnes maximum à peu près dans le spa.  On avait aussi une section qui était avec tables de massage.  Donc, si les gens passaient au massage, avant de retourner dans le spa, ils devaient prendre une autre douche parce qu'on interdisait l'huile.

101.4    Puis pour ce qui est de la propreté du spa, j'avais fait installer une machine à ozone qui brûlait automati­quement toutes les bactéries puis tout ça, puis ça avait été prouvé.  Plus, je mettais du brome qui est un peu comme du chlore, mais qui sent moins fort et qui brûle pas. ( Page 24 et 25)

101.5   

101.6    C'était le même principe avec le spa sur London.  Les deux (2) places, c'étaient les mêmes règlements. (page 25)

101.7    De toute façon, dans le bain tourbillon, on disait aux gens de pas avoir de relations sexuelles dans le bain tourbillon.  Nous, on vérifiait, on passait.

101.8   

101.9    Pour pas que ça se produise. ( page 25)

101.10Q11 La policière Fiset est venue expliquer qu'elle a vu, à une (1) ou deux (2) occasions, une masturbation dans le bain tourbillon avec éjaculation dans le bain tourbil­lon?

101.11R Bien, tu vois, moi, je l'ai pas vu.  L'avoir vu, je l'aurais avisé.

101.12

101.13Premier avertissement.  Deuxième avertissement, il est barré.  Je l'ai pas vu et il y a personne qui me l'a mentionné. (pages 24et 25)

101.14

101.15C'est important aussi de mentionner, pour les chambres puis tout ça, on avait quelqu'un qui vérifiait, qui passait pour la propreté, pour changer les draps s'il y avait des gens qui... disons qu'il y avait des gens dans la chambre puis eux partaient puis la chambre tombait libre, à ce moment-là, on allait changer le drap, automatiquement.(page 26)

101.16

101.17L'eau du bain était changée une (1) fois par semaine.  Donc, on faisait la soirée le vendredi, le samedi. Dans la semaine, c'était changé. (page 26)

101.18

101.19C'était vidé au complet.  On avait même acheté une pompe pour la vider jusqu'au fond." (page 26)

101.20

101.21J'allais voir les couples que c'était la première fois:  "Puis, comment tu te sens là-dedans?  As-tu des questions, as-tu des problèmes?"  Puis c'est sûr qu'on vérifiait que les règlements soient bien sui-vis.(page 32)

101.22On a beaucoup de règlements.  On a, comme je disais, le respect, c'est sûr.  Les condoms, c'est sûr.  Propreté, la douche, d'apporter leur alcool.  Pas de drogue, du tout.  Pas de prostitution du tout.  Pas de montants d'argent que les gens vont se donner entre eux autres pour des faveurs ou des services, ça, c'est sûr et certain.  Dix-huit (18) ans et plus, ça, c'est bien sûr.(page 33)

102.        Ce n'est donc pas surprenant qu'elle n'ait jamais eu de plainte comme elle l'établit à la page 29:

102.1    " Moi, à une ou l'autre des deux (2) places, j'ai jamais eu une plainte, aucune plainte de bruit, ni à une, ni à l'autre, aucune plainte d'agressivité, aucune plainte de malpropreté, aucune plainte.

103.        Et à la page 55 d'ajouter:

103.1    "Mais j'ai jamais eu de plainte sur London non plus"

104.        Aux pages 27, 31, 56 et 59 Brigitte Chesnel explique ce qu'est, et n'est pas, la culture échangisme, les préjugés qui existent, comment elle fonctionne et pourquoi il est important que les adeptes de cette culture puissent avoir un endroit hors de leur résidence, comme le club Brigitte et Michel pour jouir pleinement de leur liberté d'association, et ce, sans déranger personne:

104.1    " C'est-à-dire que les gens, quand on parle d'échangistes, ont tous une idée déjà pré-établie dans la tête.  Puis quand je faisais les reportages, tout ça, je disais toujours aux gens qu'il y a beaucoup de monde qui pensaient que l'échangisme avait à voir avec la malpro­preté, avec la bestialité, avec... vicieux, tout ça.  Ça l'a rien à voir du tout.

104.2    C'est un groupe de gens dans une classe moyenne et plus, je dirais.  C'est des gens qui ont des familles, c'est des gens qui font... qui travaillent, c'est des gens qui ont des bons revenus, en général, toujours.  C'est des gens qui veulent vivre.

104.3    C'est des gens qui sont en couples.  Puis souvent, ça va être après plusieurs années.  Sais-tu qu'est ce que qu'ils me disent?  Ils me disent:  "Au lieu d'aller tromper ma femme ou d'aller tromper mon mari, on y va ensemble."

104.4    Puis il y a beaucoup de monde, aussi, qui ont dit que ça les a aidés dans leur couple.  Fait que les gens, je crois que quand ils sont... c'est rare qu'une personne vient ou un couple venait puis revenaient plus.  C'était très très rare. (page27)

104.5   

104.6    Nous autres, ce qu'on voulait, pourquoi qu'on divise en deux (2) sections, c'est parce que la section bar, discothèque, il y avait aucun acte, aucune scène de nudité.  Ils dansaient, ils s'embrassaient, ils se frottaient, mais pas plus.

104.7    Pourquoi qu'on a fait ça?  Parce que, comme je dis, il y a débutants, il y a intermédiaires puis il y a expert.  Puis on voulait pas froisser des gens qui étaient pas prêts à voir certaines choses.

104.8    C'est pour ça que c'était mentionné aux gens d'aller à leur rythme et... (page 28)

104.9   

104.10Oui, le vendredi, on acceptait les hommes seuls.  Les samedis, on les acceptait pas.  Ça, on a commencé seulement avec les vendredis... seulement les samedis, excusez, pour couples.  Et puis avec la demande, les gens ont demandé d'avoir des vendredis avec des hommes seuls...(page 31).

104.11

104.12... et des femmes seules aussi, bien sûr. (page 31)

104.13

104.14Bien, l'échangiste peut être dû puis vit de plusieurs façons.  Il y a plusieurs couples où la femme voulait avoir la présence d'un autre homme ou deux (2) autres hommes ou trois (3) autres hommes; ça, c'était vraiment son libre choix à elle de décider.(page 31)

104.15

104.16Parce que qu'est-ce qui arrive, c'est que dans le milieu échangistes, les gens ont pas vraiment... ils avaient pas vraiment d'endroit pour se rencontrer.  C'est sûr qu'il y a eu des petites annonces de rencontres entre couples puis tout ça.  Sauf que les gens aimaient pas se rencontrer à la maison parce que c'est un endroit personnel.

104.17Les gens voulaient un endroit où est-ce qu'ils pouvaient rencontrer plusieurs couples, donc pouvaient avoir du choix.  Puis pouvaient se rencontrer aussi sur un terrain neutre tout en ayant une sortie.

104.18Ensuite, ces personnes-là, la plupart ont des enfants, ont des familles puis ils veulent pas mélanger les amis avec leurs enfants, leurs choses personnelles, leur chambre, leur maison.

104.19Ça fait que c'est pour ça qu'ils venaient chez nous.(page 56)

104.20

104.21Ensuite, je veux dire, moi, je suis persuadée... c'est comme les... tous les gens qui vont innover, dans un certain milieu comme dans le temps qu'ils disaient que la Terre était ronde puis, là, ils se faisaient brûler puis tout ça, là.  Bien, ça, ces gens-là, ils ont innové.  C'est grâce à ces gens-là qu'on évolue aussi.

104.22Puis, moi, je pense que l'échangisme, ça va évoluer d'une manière ou d'une autre.  Puis je pense que, à un moment donné... la demande est là, de plus en plus.  Pourquoi il y a de plus en plus de reportages là-dessus?  Les reportages sont faits à la demande des gens.  Les gens veulent de l'information là-dessus.  Les gens sont curieux.  Puis, moi, je suis persuadée que ça va marcher, l'échangisme.(page 59)

104.23

104.24Puis je le referais encore parce que c'est sain, dans le fond, c'est sain.  C'est sain.  Et c'est des gens consentants, c'est des adultes.  Les gens viennent pour une raison puis je vois pas qu'est-ce qu'il y a de mal là-dedans, sérieux.

104.25Qu'est-ce qu'il y a de mal entre deux (2) adultes ou quatre (4) adultes ou dix (10) adultes consentants?  Si la madame, elle aime ça comme ça puis le monsieur aime ça comme ça, là, bien ça, c'est leur choix.(page 59)

104.26

104.27C'est mieux de le faire dans un endroit comme ça que de le faire à la maison puis qu'un enfant se lève dans le milieu de la nuit ou que quelqu'un arrive à l'imprévu puis qu'il voit des choses qui pourraient les offusquer.

104.28C'est un endroit neutre qui est réservé aux adultes avertis, donc ils savent qu'est-ce qui se passe.(pages 59 et 60)

105.        Au pages 74 et 104, Brigitte Chesnel établit clairement les règles et l'usage quant aux condoms dans le milieu échangiste:

105.1     Bien, je veux dire, les gens qui échangeaient, ceux qui faisaient la pénétration — parce que c'est pas la majorité — mettaient le condom.  Il peut y avoir des gens qui ont pas mis le condom, mais il y a des gens qui échangent avec leur propre partenaire, donc ils le mettaient pas le condom. (page 74)

105.2    Q12 Comment vous faites pour dire que, justement, les gens en apportaient des condoms?

105.3    Bien, parce que je trouvais des sachets, je trouvais des condoms dans les toilettes, je les voyais aussi puis j'en donnais aussi.

105.4    Q13 O.K.

105.5    Puis lors de la descente, ils en ont trouvé, des condoms.(page 74)

105.6   

105.7    La règle, dans le milieu échangiste, est que la conven­tion des échangistes veut que le condom soit utilisé si jamais il y a échange de partenaires.  Un couple, des conjoints, n'ont pas besoin de mettre le condom.  Dès qu'il y a un échange, à ce moment-là, le condom est obligatoire et normal." (page 104)

106.        Contrairement à ce que la policière Fiset a voulu sous entendre que Brigitte et Michel acceptaient beaucoup de célibataires, Brigitte et Michel partagent plutôt la préoccupation du tribunal concernant les célibataires "profiteurs" qui ne seraient pas d'authentiques adeptes de l'échangisme tel qu'elle l'explique aux pages 113 et 114:

106.1    " Parce que ce que j'essayais d'établir, c'était un couple, un célibataire, un couple, un célibataire.  Pourquoi je faisais ça?  Si ça avait été une question d'argent, j'en aurais pris plein de célibataires.

106.2    Les célibataires, j'ouvrais les téléphones à midi (12 h 00), à deux heures (2 h 00), c'était complet.  Si c'était une question d'argent, j'en aurais eu trois (3) célibataires pour un couple, quatre (4) célibataires pour un couple.

106.3    Le but, c'était vraiment... on a fait ces soirées-là pour la demande des couples.  La demande des couples, quand même, veulent avoir... veulent pas avoir une multitude d'hommes seuls, veulent avoir un choix varié d'hommes seuls, mais quand même restreint (inaudible)

106.4    Ça fait que c'est pour ça que le ratio était un couple, un homme seul, en moyenne.  C'était juste parce que pour faire des belles soirées.(pages 113 et 114)

107.        Le tribunal peut ainsi comprendre et conclure que les célibataires ont un rôle a jouer dans le milieu échangiste mais qu'il semble raisonnable de croire que le milieu échangiste lui-même fait en sorte que les indésirables, les profiteurs ou les célibataires qui ne seraient pas d'authentiques échangistes, ne soient pas acceptés.

108.        À la page 115 Brigitte Chesnel établit que la société, non seulement tolère l'échangisme, mais elle s'y intéresse et en demande de plus en plus, ce qui démontre l'évolution qui s'effectue actuellement et depuis un certain temps:

108.1    " Oui, j'ai fait une émission à "Sexe et confidences".  C'est eux qui m'ont approchée, c'est eux qui m'ont appelée.  Ils m'ont demandé si j'étais intéressée.  En-suite, ils m'ont demandé s'ils pouvaient venir me ren-contrer.  Il y a des gens qui m'ont déconseillé de le faire jugeant que.. "Fais pas ça.  Fais pas ça."

108.2    Moi, j'ai dit:  "Bien, certain que je le fais.  Je veux faire connaître ça aux gens.  J'ai pas honte de ça.  Je veux que les gens voient c'est quoi.  Les gens en entendent parler.  Je veux que les gens sachent exacte­ment c'est quoi, que ça devienne de plus en plus connu puis de plus en plus fréquenté, aussi."  Parce que si on va avec la population, ça rajeunit beaucoup puis il y en a toujours de plus en plus.

108.3    Puis après que j'ai fait cette émission-là, j'ai eu tellement de téléphones puis tellement de gens qui se sont renseignés puis qui ont aimé l'émission, assez qu'ils l'ont refaite en reprise sur demande voilà pas longtemps encore.

109.        Au visionnement de la cassette de l'émission "Sexe et Confidences" animée par la sexologue Louise-Andrée Saulnier et qui fut produite comme pièce D-5 le tribunal a pu constaté la propreté des lieux et en particulier la limpidité de l'eau du bain tourbillon, qui démontre objectivement que l'hygiène et la propreté semblent être de mise chez Brigitte et Michel.

110.        Aux pages136 et 137, Brigitte Chesnel établit que les clubs échangistes ne sont pas des endroits de sexe débridés où les excès deviennent des orgies des beuveries et le "free for all", comme semblent le préjugé les policiers et la poursuite qui sont victimes de leurs préjugés causés et entretenus par leur aveuglement volontaire qui consiste à ne pas avoir chercher à comprendre la différence entre une maison de débauche où l'argent et l'exploitation du sexe sont les moteurs et un club échangiste où de simples badauds viennent se rencontrer et s'épanouir dans le respect et le consentement mutuel:

110.1    " Beaucoup de gens ne se déshabillaient pas.  Moi, Monsieur le Juge, j'aimerais ça que vous compreniez que les soirées étaient organisées... pourquoi que... les gens étaient pas obligés de se déshabiller parce qu'on ne voulait pas inciter les gens à avoir du sexe.  On ne voulait pas inciter les gens qu'ils sentent une obliga­tion.  On ne voulait pas que les gens se sentent mal à l'aise.

110.2    Les gens allaient à leur rythme.  Les gens avaient envie de se déshabiller, ils le faisaient — on s'entend bien, aux endroits admis — les gens qui voulaient rester habillés restaient habillés.

110.3    J'ai déjà refusé des gens de rentrer parce qu'ils avaient bu trop d'alcool, ils étaient saouls.  Il y en a parce qu'ils n'étaient pas propres.  C'est une place qui est tenue.  C'est propre.  Faut que les gens se sentent bien.

110.4    (inaudible) que les gens reviennent puis si je veux que ça continue à évoluer, il faut que les gens se sentent bien puis ça prend une grande liberté d'expres­sion aussi. Les gens doivent beaucoup communiquer entre eux autres.(pages 136-137)

111.        Les policiers sont bien mal placés pour venir accuser le club Brigitte et Michel alors que par leur comportement et par leur absence d'intervention pendant 21 mois, ils ont eux-mêmes toléré les activités échangistes malgré les visites qu'ils ont fait des lieux et toute l'information disponible qui leur a été transmise par Brigitte, son site ou sa publicité tel qu'il appert à la page 144 :

111.1    Q14 Quand les policiers sont allés vous voir, vous avez dit une première fois ils sont venus parce qu'ils étaient curieux, ils sont rentrés parce qu'ils ont vu des gens rentrer.  On voit dans un des rapports, d'ailleurs qui est produit au dossier qu'il y a des policiers qui confirment ce que vous venez de dire.  Est-ce que vous leur avez fait visiter, aux policiers?

111.2    R Oui.

111.3    Q15 Vous leur avez montré ce qu'on a vu là?

111.4    R Exactement.

111.5    Q16 Est-ce qu'ils ont...

111.6    R Ils ont dit que c'était beau.

111.7    Q17 ... fait un commentaire négatif quelconque?

111.8    R Négatif, non.

111.9    Q18 Est-ce qu'ils vous ont donné un avis d'arrêter?

111.10R Non.

111.11Q19 Est-ce qu'ils vous ont demandé d'informer la police ou des choses comme ça?

111.12R Non."

112.        Si les policiers justifient leur position à cause du "vide juridique", pourquoi les accusés ne pourraient-ils pas en bénéficier aussi ?

113.        Le tribunal doit prendre en considération que le club échangiste Brigitte et Michel a été mis sur pied d'une façon bien informelle et que l'absence de règles et ce "vide juridique" ne peuvent pas être reprochées à Brigitte qui précise ainsi comment tout cela a commencé:

113.1    "… c'est moi, Brigitte Chesnel, madame tout le monde qui a décidé de faire des soirées.  Mais tu vois bien que c'est pas bien bien professionnel, ça là.  Mais moi, je me comprenais, ça allait bien.  Je me comprenais comme ça, c'était correct.(page 186)

BRIGITTE CHESNEL LE 24 MAI 2002

 

114.        La perquisition de novembre 1999 n'a pas régler l'incertitude et le "vide juridique" dans lequel Brigitte et Michel se trouvaient comme l'explique Brigitte Chesnel aux pages 37 et 38:

114.1    " Après la descente, chaque semaine, il y avait des nouveaux règlements d'ajoutés, des nouveaux règlements d'enlevés.  On en mettait, on l'enlevait, on l'appli­quait, on savait plus.  Les gens nous disaient:  "Faites ci pour que ce soit..."  Toutes sortes de conseils.

114.2    Dans le fond, on était... on savait plus qu'est-ce qu'on doit faire, qu'est-ce qu'on doit pas faire, de quelle façon que ça doit marcher.

114.3    Ce qui arrive, c'est qu'on n'a aucune idée à sa­voir... moi, dans le sens que je disais toujours, c'est qu'on voulait avoir un genre de ligne de conduite, si vous voulez.

114.4    C'est comme, moi, je disais toujours, on dirait que je suis comme dans le néant là-dedans.  J'aime ces soirées-là.  Je suis persuadée que ces soirées-là ont une place dans la société, mais c'est sûr que, à un moment donné, ça va prendre une ligne de conduite.

114.5    Puis le but, c'est d'arriver à établir une loi là-dessus avec des lignes de conduite à suivre depuis des règlements puis... parce que c'est compliqué pour le système, mais, moi, c'est comme ça que je voyais ça.  J'essayais de... avec ma petite logique à moi là...".

115.        Contrairement à ce que l'on pourrait penser, le jugement rendu dans le cas de L'Orage n'avait pas réglé le problème ni comblé le "vide juridique" du club échangiste Brigitte et Michel. En effet, comme on le verra en analysant la jurisprudence, dans le cas de L'Orage il y avait un élément très différent d'avec Brigitte et Michel: le permis d'alcool.

116.        Le fait qu'il y avait un permis d'alcool dans le dossier de L'Orage donnait un caractère apparemment publique à l'endroit, alors dans le cas de Brigitte et Michel, il n'y avait aucun permis d'alcool susceptible de donner un caractère apparemment publique. Le fait que les relations sexuelles se tenaient dans une dépendance d'un local détenant un permis d'alcool ayant apparemment un caractère publique, la juge Louise Baribeau avait un élément majeur très différent pour conclure sur le caractère publique des lieux où les relations sexuelles avaient eu lieu.

117.        De plus, comme Brigitte Chesnel l'a dit à la page 157 de son témoignage du 23 mai 2002, " Mon idée "n'était pas d'en faire un commerce" et d'ailleurs, elle n'avait aucune enseigne publique sur l'immeuble pour solliciter le publique.

DENIS CHESNEL LE 30 MAI 2002

 

118.        De la page 135 à la page 145 en particulier et tout au long de son témoignage, Denis Chesnel a expliqué comment il en est venu à s'intéresser à l'échangisme. Il a aidé financièrement sa fille Brigitte mais il n'a pas été personnellement impliqué dans la tenue du club échangiste Brigitte et Michel.

119.        À la page 145 Denis Chesnel établit que Danièle Rochon était déménagée depuis février 1999 et elle n'avait rien à faire avec l'organisation d'une maison de débauche ni sur la rue London ni sur Rosemont.

120.        Si elle a participer à des rencontres échangistes à une époque où elle était propriétaire de la résidence privée de la rue London, aucune preuve concrète, claire, précise et hors de tout doute raisonnable n'a été faite de la concordance d'activités illégales et de sa période de propriétaire.

121.        Le tribunal est donc justifier d'accorder le bénéfice du doute à Danièle Rochon et de l'acquitter, nonobstant tous les autres arguments de fond qui sont discutées dans les présents dossier.

122.        Quant à Denis Chesnel, il ne faisait pas des rencontres privées à sa résidence  "à toutes les fins de semaine" (page 163) et il ne chargeait pas nécessairement (page 165) et les gens qui venaient chez lui n'était pas des clients (page 167) et l'argent servait à payer certaines dépenses (page 168) et il n'a "jamais fait de profits avec ça" (page 169) et sur Rosemont, sa "seule implication" c'est d'avoir "permis à Brigitte de prendre un local" (170) et de lui prêter de l'argent (pages 170 et 173).

DENIS CHESNEL LE 1 OCTOBRE 2002

 

123.        Aux pages  84 et suivantes et aux pages 132 à 138 de son témoignage du 1 octobre 2002, Denis Chesnel est venu préciser son témoignage et produire un document pour expliquer pourquoi le nom de Danièle Rochon apparaissait encore comme propriétaire par exigence de la Banque malgré son départ en février 1999.

124.        Quand il organisait des rencontres sur la rue London "Bien c'était pour avoir du fun." (page 162) et après son propre départ de sa résidence de la rue London, il a loué la maison à un dénommé Witthon le premier octobre 1999. (page 176 et D-20).

125.        À la page 168 il établit pourquoi la présence d'un ou d'une célibataire fait partie de la culture échangiste:

125.1    " Mais l'échangisme, c'est... d'une personne à l'autre, (inaudible) tu as des couples d'échangistes qui vont inviter un homme, ça leur prend ça.  Tu as des échangis­tes qui vont inviter une femme, ça leur prend ça.

125.2    Un échangiste, t'sais, l'échangisme, c'est grand, mais c'est pas juste un couple avec un couple.  Ça peut être un couple avec un célibataire.  Ça peut être un couple avec deux (2) célibataires.  T'sais, ça peut être un couple avec deux (2) autres couples.  C'est des échanges...

125.3    Il y a beaucoup d'hommes dans les échangis­tes qui aiment voir leur femme faire l'amour avec une autre femme, ça, c'est (inaudible) tous les hommes, remarque bien, là.  Ça, c'est ça.  Mais tu as des hommes qui aiment voir leur femme faire l'amour avec un autre homme.

125.4    Il y a une grosse demande là-dedans, là.  C'est pas petit.  Puis tu as beaucoup de femmes qui aiment voir un homme faire l'amour avec une autre femme.  Moi, ma blonde, quand je fais l'amour avec une autre femme, ça l'excite.  C'est vrai.

125.5    Moi, quand elle fait l'amour avec un autre homme, oublie, oublie ça, ça m'excite pas.  Ça dépend des personnes.  Il y en a d'autres que ça les excite.  Moi, je veux dire, moi, voir ma blonde avec un autre gars, ça me fatigue.  Il y en a d'autres que ça les excite, il y en a qui aiment ça.  T'sais, il y en a qui vont pas jusqu'à la pénétra­tion."

126.        Aux pages 170 et 173 Denis Chesnel établit que ce qui se passe dans les clubs échangistes ce n'est pas des orgies comme peuvent le préjuger les gens qui ne sont jamais allés dans un club échangiste authentique:

126.1    "C'est pas une orgie, j'appelle pas ça une orgie, là, l'échangisme.  Les clubs échangiste, Monsieur le Juge, c'est pas des orgies, là.  Moi, je peux vous le dire, je suis pas un expert, là, peut-être, ça vaut qu'est-ce que ça vaut, mais c'est pas des orgies, là."(page 170)

126.2    "Des orgies, pour moi, des orgies, c'est tout le monde est gelé, tout le monde est sur la poudre, tout le monde baise avec n'importe qui, tout le monde saute là, tout le monde saute là, puis tu te réveilles, tu sais pas qu'est-ce qui s'est passé.  Moi, pour moi, c'est ça une orgie.  Déjà là, le mot est pas beau.  Donc, la chose est pas belle.  Mais croyez-moi, dans les échangistes, c'est très bien." (page 173)

127.        D'ailleurs les vidéocassettes de la police qui montrent les échangistes à l'œuvre chez Brigitte et Michel confirment qu'il ne s'agit pas d'orgies "free for all".

128.        Avec toute la preuve qui démontre le respect et la bonne entente qui règne dans le milieu échangiste, le tribunal est bien fondé de conclure que les clubs échangistes comme celui de Brigitte et Michel ne semblent pas avoir intérêt à des activités de la nature excessive comme l'orgie ainsi définie.

CLAUDE GAUTHIER LE 24 MAI 2002

 

129.        Le tribunal a reconnu le statut d’expert de Claude Gauthier de la maison de sondage CROP dans le domaine sociopolitique et du sondage d’opinions publiques (page 108).

130.        Le tribunal est en mesure de constater à quel point l’exactitude d’un sondage de la maison CROP peut être élevée et reconnue publiquement par les médias, comme le démontre le résultat du sondage sur le référendum de 1995  dont parle monsieur Gauthier aux pages 88 et 99.

131.        À la page 109 il définit sont mandat de la façon suivante

131.1    "Le mandat, c'était d'examiner, d'étudier, de mesurer, d'évaluer l'opinion publique quant à ses attitudes face à des pratiques, des activités sexuelles et particuliè­rement contre... à l'égard des pratiques échangistes, des clubs échangistes, des pratiques sexuelles échangis­tes, essayer de voir, à travers le Canada, quelle était... où en était rendue un peu l'opinion publique par rapport à ces questions-là.  Donc, une mesure d'évalua­tion."

132.        Aux pages 113 et 116 l’expert Gauthier explique le but d’un sondage et la façon de rédiger les questions pour atteindre ce but, tout en évitant spécifiquement de faire un sondage qu’on pourrait qualifier de complaisant :

132.1    "C'est d'être en mesure comme n'importe quelle étude de ce genre-là, de répondre à une question qui nous est posée par le client à savoir, bon, est-ce que, dans la société dans laquelle on vit présentement, est-ce qu'il y a des questions, est-ce qu'il y a des manières de voir, d'interroger les gens afin de savoir s'ils sont ouverts ou pas, si ça les dérange ou pas, la pratique des clubs échangistes."

133.        De la page 149 à la page 159, l’expert Gauthier explique et analyse plus particulièrement la page 13 de son expertise D-7 et il établit le niveau de tolérance de la société canadienne et contemporaine en matière d’activités à connotation sexuelle comme les clubs de danseurs nus, les films pornographiques, la prostitution et dont certains résultats sont les suivants :

133.1    76 % sont peu ou pas du tout dérangés par le fait que certaines personnes fréquentent les clubs de danseurs ou de danseuses nues (91 % au Québec);

133.2    67 % sont peu ou pas du tout dérangés par le fait que certaines personnes louent des cassettes pornographiques (90 % au Québec);

133.3    47 % sont peu ou pas du tout dérangés par le fait que certaines personnes ont recours aux services d'un (e) prostitué(e) sur appel téléphonique (77 % au Québec);

133.4    35 % sont peu ou pas du tout dérangés par le fait que certaines personnes ont recours aux services d'un (e) prostitué(e) dans la rue  (65 % au Québec);

134.        Le tribunal peut donc en conclure que la société canadienne et contemporaine a une très grande tolérance concernant la nudité, le fait de voir des scènes de relations sexuelles explicites, mais qu'elle tolère moins l'exploitation des humains payés en contrepartie de relations sexuelles comme dans le cas de la prostitution.

135.        De la page 159 à la page 160, l’expert Gauthier explique et analyse plus particulièrement la page 14 de son expertise D-7 et il établit les pourcentages de ceux qui avaient entendu parlé des clubs échangistes avant le sondage:

135.1    67 % au Canada (86 % au Québec) en avait entendu parlé;

135.2    33 % n'en avait pas entendu parlé ( 45 % dans les 55 ans et plus);

136.        Cette distinction est importante car elle permet au tribunal de mieux comprendre que:

136.1    certaines personnes peuvent avoir des réserves ou des craintes face à un phénomène qu'elles ne connaissent tout simplement pas et que cela ne signifie pas qu'ils seraient nécessairement contre s'ils en avaient une certaine connaissance;

136.2    les personnes qui en ont une certaine connaissance sont plus en mesure de se prononcer car elles ont déjà eu l'occasion d'apprivoiser ou de rejeter un phénomène en toute connaissance de cause;

136.3    ce qui est pertinent pour la cour c'est de déterminer ce que pensent les gens qui ont une connaissance et non pas de demander à des ignorants de se prononcer sur un sujet inconnu.

137.        Aux pages 159 à 162, l’expert Gauthier établit que les gens sont moins dérangés et que leur niveau de tolérance est plus élevé lorsque les gens avaient déjà entendu parlé des clubs échangistes avant le sondage comme le démontre par exemple les résultats de la page 16 de D-7 qui indique que 61 % des gens (au lieu de 53 %) sont peu ou pas du tout dérangés par le fait que certaines personnes fréquentent les clubs échangistes  :

137.1    "Parmi ceux qui connaissent les clubs d'échangistes, ils nous ont dit qu'ils connaissaient ça, là, c'est à soixante et un pour cent (61%) qu'on dit que ça nous dérange peu ou pas du tout.

137.2    Autrement dit, si on... plus on est connaissant, mais les gens qui... de pas vraiment nous ont dit connaître ça, ils ont déjà entendu parler, t'sais, ils savent que ça existe, eux, ils sont plus portés que ceux qui con-naissent pas ça, à nous dire que ça les dérange peu ou pas du tout.

137.3    On pourrait dire le fait de connaître la chose fait en sorte qu'on est... je connais ça, ça me dérange absolument pas.  Bon.  J'ai déjà entendu parler de ça, j'ai vu ça aux nouvelles ou quelque chose, j'ai lu là-dessus puis ça me dérange pas."

138.        De la page 164 à la page 188 l’expert Gauthier établit certains pourcentages qui démontrent d’une façon objective, scientifique, contemporaine et canadienne une tendance à la tolérance en matière de sexualité en général et face à l'échangisme en particulier comme on le retrouve dans le sondage D-7.

139.        Ainsi à la page 165 il établit que:

139.1    "Soixante-dix-huit pour cent (78%) des Canadiens se sont dit d'accord avec l'énoncé suivant:

139.1.1"Du moment qu'ils ne dérangent personne et qu'ils sont consentants, les adultes peuvent vivre leur vie sexuelle comme ils l'entendent."

139.2    Donc, ici, on est... bon, on parlait pas encore d'échan­gisme, là, mais c'est la liberté.  Les gens pensent qu'ils vont faire et laisser faire, du moment qu'ils font ce qu'ils... les adultes peuvent vivre leur vie sexuelle comme ils l'entendent, du moment qu'ils dérangent personne.

139.3    Dans un deuxième cas, on a voulu être plus précis puis, là, parler des clubs:

139.4    "Du moment que les adultes qui les fré­quentent ne dérangent personne et qu'ils sont consentants, je ne vois aucun pro­blème à l'existence de ces clubs échangis­tes dont on a parlé un petit peu plus tôt."

139.5    Là, vous avez soixante-quatre pour cent (64%) de l'ensem­ble des Canadiens qui se dit d'accord avec cet énoncé et même au Québec, vous avez même soixante-seize pour cent (76%) des gens qui sont... "

140.        Aux pages 168 et 169 l'expert Gauthier témoigne au sujet de la page 18 du sondage D-7 et il établit que :

140.1    "Page 18, c'est fort intéressant, ça aussi.  Donc, on revient aux mêmes affirmations qu'on vient de mesurer mais vues sous un autre angle, sous l'angle, on a conservé nos mêmes totaux.

140.2    Maintenant, la différence entre le "Est-ce que le fait de connaître ou pas l'existence de clubs d'échan­gis­tes, (inaudible)" est-ce que ça modifie les attitudes faces à des opinions comme celles-là?  Encore une fois, on voit que oui, le fait de...:

140.3    "Du moment qu'ils ne dérangent personne et qu'ils sont consentants, je ne vois aucun problème à l'exis­tence."

140.4    On voit que ceux qui connaissent les clubs sont à quatre-vingt-trois pour cent (83%) d'accord avec ça, versus soixante-quinze pour cent (75%) pour ceux qui ne le connaissent pas.  Mais toujours la même opinion qui demeure, toujours en haut, la plus favorable.

140.5    On voit aussi, selon les groupes d'âges.  Si on a entre dix-huit (18) et trente-quatre (34) ans, c'est à quatre-vingt-huit pour cent (88%) qu'on est d'accord avec une telle opinion.

140.6    Si on a un âge moyen, entre trente-cinq (35) et cin­quante-quatre (54) ans, c'est à soixante-dix-huit pour cent (78%) qu'on est d'accord avec cette affirmation-là.  Et même si on a cinquante-cinq (55) ans et plus, ici, c'est à soixante-six pour cent (66%) qu'on se dit, et je rappelle, "tout à fait ou plutôt d'accord" avec l'affirmation 4A.

140.7   

140.8    4C, c'est-à-dire, merci:

140.9    "Du moment que les adultes qui les fré­quentent ne dérangent personne et qu'ils sont consentants, je ne vois aucun pro­blème à l'exis­tence."

140.10Chez ceux qui nous ont dit connaître l'existence de clubs d'échangistes, c'est soixante-dix pour cent (70%) qui sont d'accord avec l'avis, l'opinion, versus cinquante et un pour cent (51%) de ceux qui connaissent pas ça."

141.        Aux pages 170 à 177, à la question 722 et ss. l'expert Gauthier établit que :

141.1    " Moi, je suis rendu à la page 18.  Le dernier, je pense que le dernier graphique, on a terminé la dernière question du sondage.  Après avoir passé en revue les différentes façons:  Est-ce que ça dérange les gens, est-ce qu'ils sont en accord ou en désaccord avec un certain nombre d'affirmations, on a clôt le sondage en leur demandant:

141.1.1"Même si personnellement vous ne fréquen­teriez jamais un club d'échangistes, dans quelle mesure tolérez-vous que des adultes d'âge légal, avertis et consentants, assistent ou participent à des activités sexuelles explicites, en groupe, dans un établissement prévu à cette fin qui leur est réservé.  Ces activités se font à l'abri du regard du public ne désirant pas y assister ou y participer.  Pour vous est-ce tout à fait tolérable, plutôt toléra­ble, plutôt intolé­rable, ou tout à fait intolérable?"

141.2    Voici les réponses.  Ici, ce qu'on a donné comme réponse, c'est, en rouge, vous avez ceux qui ont dit "tout à fait tolérable" et en jaune "plutôt tolérable."  Donc, c'est les réponses positives.

141.3    L'inverse, ça va être ceux qui ont dit qu'ils étaient plutôt intolérable ou tout à fait intolérable.  Le détail, on peut l'avoir toujours dans les tableaux statistiques détaillés du sondage.  Mais je vous donne le guide line, là.  L'inverse, c'est ceux qui trouvent ­ça intolérable.

141.4    Donc, dans l'ensemble du Canada, en réponse à cette question-là, vous avez vingt-trois pour cent (23%) des gens qui nous ont dit qu'ils trouvaient ça tout à fait tolérable l'existence des clubs d'échangistes.  Et trente-quatre pour cent (34%) plutôt tolérable quand on prend l'ensemble du Canada, cinquante-sept pour cent (57%).

142.        De la page 178 à 180, l'expert Gauthier fait des distinctions en fonction de la connaissance préalable des clubs échangistes et l'âge des gens et il établit que :

142.1    " Et on remarque ici, encore une fois de plus, si on compare "connaît clubs" et "ne connaît pas clubs", si on veut affirmer qu'on avait déjà entendu parler de ça, des clubs échangistes, qu'on savait de quoi il s'agis­sait, on est plus, encore là, (inaudible), il y a plus de gens, une proportion plus importante de gens qui se disent tolérants par rapport à ceux qui ne connaissent pas.

142.2    Les gens, autrement dit, des gens qui ne connaissent pas ça, ça doit pas être bon (inaudible).  Donc, au contraire, si on connaît ça, on est plus porté, on connaît ça et on dit qu'ils trouvent ça tolérable.  On connaît pas ça, puis on trouve ça intolérable.

142.3    Quand on regarde aussi nos principaux groupes d'âge qu'on a retenus durant toute l'étude, on voit aussi, sauf ça, on ne sera pas trop trop surpris de voir que si on a dix-huit (18), trente-quatre (34) ans puis à soixante-dix pour cent (70%) qu'on dit qu'on trouve ça tout à fait ou plutôt tolérable.

142.4    Un petit peu moins si on a entre trente-cinq (35) et cinquante-quatre (54) ans.  En haut de cinquante-cinq (55) ans, ça baisse à quarante-cinq pour cent (45%).  même que je pourrais vous dire même quand on va dans le détail des résul­tats, jusqu'à soixante-cinq (65) ans... entre cin­quante-cinq (55) et soixante-quatre (64) ans, c'est aussi à cinquante-sept pour cent (57%).  C'est uniquement en haut de cinquante-cinq (55) ans que, là, ça baisse à trente-huit (38).  C'est pour ça que la moyenne des cinquante-cinq (55) et plus est de quarante-cinq pour cent (45%).

142.5    Donc, puis, moi, ce que j'ai vu dans les résultats (inaudible), c'est jusqu'à soixante-quatre (64) ans, vous avez une majorité de gens qui nous disent qu'ils trouvent ça tout à fait ou plutôt tolérable.

142.6    Et je crois que ce serait intéressant de vous dire que ça va être quelle proportion du public ça représente ça.  Quand on prend les dix-huit (18), trente-quatre (34) ans puis les trente-cinq (35)... oublions les cinquante-cinq (55) ans et plus, là.

142.7    Mais les plus tolérants, là, les dix-huit (18), trente-quatre (34) ans puis les trente-cinq (35), cinquante-quatre (54) ans, au Canada, la population adulte, ça représente soixante et onze pour cent (71%) de la popula­tion adulte.

142.8    Les dix-huit (18), cinquante-quatre (54) ans, ça re-présente soixante et onze pour cent (71%) de la popula­tion adulte du Canada.  Donc, c'est quelque chose qui... c'est une masse importante de citoyens pour qui, très majoritairement, c'est quelque chose qui est jugé, avec les nuances, tout à fait ou plutôt tolérable."

143.        De la page 181 à 188 et plus particulièrement à compter de la page 182, l'expert Gauthier conclut de la façon suivante: 

143.1    "Donc, après lecture de la définition d'un club d'échan­gistes, ce qu'on a fait à quelques reprises (inaudible), afin de mettre tous les répondants à égalité, plus de la moitié de la population, cinquante-trois pour cent (53%), se déclare peu ou pas du tout dérangée par le fait que d'autres adultes fréquentent ces clubs.

143.2    Cette proportion grimpe à soixante et un pour cent (61%) lorsque l'on considère les individus ayant déjà entendu parler de l'existence de ces clubs.  Il y a soixante-sept pour cent (67%) de l'ensemble des répon­dants qui connaissaient préalablement l'existence de ces clubs:  quatre-vingt-six pour cent (86%); au Québec, c'est ce qu'on a vu ici dans la présentation (inaudible) tout à l'heure.

143.3    Quatrièmement, il est intéressant de noter que même si une forte majorité, quatre-vingt-sept pour cent (87%), déclare ne pas vouloir personnellement visiter un club d'échangistes, plus de six (6) répondants sur dix (10), soixante-quatre pour cent (64%), ne s'opposent pas à ce que d'autres adultes fréquentent de tels éta­blissements.  Ça, c'est dans l'opinion (inaudible) aussi des affirma­tions de tout à l'heure.

143.4    Enfin, soit le dernier graphique qu'on a pu visionner ensemble tout à l'heure, au total, donc, cinquante-sept pour cent (57%) des répondants — et ça, c'est des Canadiens — disent tolérer que d'autres adultes fréquen­tent des clubs d'échangistes définis de la même façon à l'ensemble des répondants.  On a donné la définition.

143.5    Ce cinquante-sept pour cent (57%)-là monte à soixante-quatorze pour cent (74%) si on (inaudible), à soixante-dix pour cent (70%) chez les dix-huit (18), trente-quatre (34); cinquante-sept pour cent (57%) chez les trente-cinq (35), soixante-quatre (64).  Et c'est des groupes (inaudible) tout à l'heure, corres­pondent (inaudible) canadiens.

143.6    Et cinquante-sept pour cent (57%) des individus ayant déjà entendu parler des clubs sont aussi des gens qui disent tolérer.

143.7    La conclusion, une fois qu'on a pris connaissance de ça, moi, ma conclusion, ce que le sondage indique que la majorité de la population adulte canadienne d'au­jourd'hui, contemporaine, (inaudible), tolère l'exis­tence des clubs d'échangistes pour adultes avertis et consentants.

143.8    Si on veut, si je reviens à mon point de départ quel était l'objectif, le mandat du sondage, est-ce qu'ils tolèrent ou pas, bien, ma conclusion doit donc dire:  En fait, est-ce que j'ai trouvé quelque chose?  Oui, cinquante-sept pour cent (57%) des gens tolèrent, selon la façon dont on a mesuré."

143.9   

143.10" Bien, moi, je pense le fait d'avoir, comme je l'ai mentionné, d'avoir essayé, par diverses façons, de mesurer ce qu'on voulait mesurer, d'avoir, somme toute, comme on vient encore de le voir dans les faits sail­lants puis dans les graphiques, une certaine cohéren­ce... plus qu'une... une cohérence certaine, quelle que soit la façon dont on pose les questions, vous voyez des majorités, soit de gens qui disent que ça les dérange peu ou pas ou bien non s'ils trouvent ça tout à fait ou à plutôt tolérable, là.  C'est une autre façon de le mesurer avec un autre mot.

143.11Et puis, ensuite, les affirmations "Êtes-vous ­tout à fait d'accord, peu d'accord?"  Moi, je me dis le fait... une des raisons pour lesquelles, surtout quand on mesure un sujet comme celui-ci, moi, je me sens, comme chercheur, beaucoup plus rassuré que d'avoir essayé de mesurer avec différents mots, sous différentes formes d'attitudes, de tolérance, de "Est-ce que ça vous dérange?" des choses comme ça.

143.12Donc, quel que soit le mot qu'on utilise, on s'aper­çoit, donc qu'il y a une certaine constante puis les pourcentages peuvent varier, des fois, de quelques points, là, mais en gros, (inaudible) et majorité chez les personnes de cinquante-cinq (55) ans, chez les Québécois, chez les gens qui connaissent les clubs, quelle que soit la façon dont tu poses la question.

143.13Donc, pour moi, ça me rassure sur la qualité du sondage et sur aussi la précision."

143.14

143.15

143.16" Je pourrais vous dire, d'une part, que je prédis pas l'avenir, je suis pas... je ne prédis pas l'avenir, par contre, mon jugement à propos des questions comme celles-là, je me dis, si on vit dans une société où les gens... vous avez une très grosse majorité — proba­ble-ment chez les jeunes, même chez les trente-cinq (35), cinquante-quatre (54) ans — je serais étonné que des gens qui vivent dans une société qui est ouverte et qui manifeste déjà l'ouverture, puisse exécuter un retour en arrière.

144.        Le tribunal peut donc conclure qu'il ressort de l’ensemble de cette preuve prépondérante, objective, scientifique et non contredite, que:

144.1    une majorité de la société canadienne contemporaine n'est pas dérangée par les clubs échangistes;

144.2    et elle les tolère lorsqu'il s’agit d’adultes avertis et consentants et que ce qui se déroule dans un contexte et des circonstances où ces adultes ne dérangent pas les autres quand ils agissent dans un lieu où le public n’a pas d’accès s’il ne le désire pas.

CLAUDE GAUTHIER LE 27 MAI 2002 

145.        À la page 20 l'expert Gauthier établit que " … le fait de connaître l'existence de ça (les clubs échangistes) ne rend pas plus intolérant", ce que le tribunal peut interpréter positivement comme un autre indicateur de tolérance car si les gens ne sont pas plus intolérants en ayant une certaine connaissance des clubs échangistes, c'est donc dire que la connaissance ouvre les esprits et diminue les préjugés comme cela s'est produit avec le phénomène de l'homosexualité.

146.        De la page 68 à la page 76, l’expert Gauthier éclaire le tribunal sur l’utilité, la pertinence et l’importance ainsi que le but de donner une définition uniforme à tous les répondants afin de s’assurer que ces derniers ont tous reçu la même définition lorsqu’ils répondent à la même question et ce, selon des paramètres bien spécifiques :

146.1    " Avant de poser ça, on voulait que tout le monde soit informé du... en tout cas, de notre définition là, la meilleure définition à laquelle j'ai pu arriver et pour rendre ça accessible à tout le monde (page 68)."

146.2   

146.3    " Donc, je me suis dit: on va aussi mesurer...  ce serait bien de relativiser l'atti­tude des gens face à ces pratiques sexuelles-là par rapport à d'autres pratiques sexuelles. Donc, ce serait intéressant de vérifier ça se situe où dans l'échelle de tolérance des gens les pratiques échangistes par rapport, je ne sais pas, moi, à la prostitution.  On a parlé de prostitution de rue, prostitution via télépho­ne.  Par rapport aussi à d'autres choses qu'on a notées dans ce qui dérangeait les gens là.  J'ai oublié un petit peu, mais...  Bon.  Le but, c'était de...  fréquenter des clubs de danseurs ou danseuses nues et puis de louer des vidéo-cassettes.

146.4    Donc, on voulait savoir... on s'est dit, bon, ça va nous permettre de savoir...  si tu poses seulement la question dans un premier temps qu'est-ce qui vous dérange, est-ce que ça vous dérange les clubs d'échan­gistes et puis tu obtiens le même pourcentage, cin­quante-trois pour cent (53%) qui disent ça me dérange peu ou pas, là, je vais me dire:  c'est-tu beaucoup, ça, cinquante-trois pour cent (53%)?  Ça se compare à quoi? Alors là, je me suis dit: bon, prévenons la chose, allons voir aussi... essayons de mettre des choses qui peuvent nous apparaître... je pense que fréquenter des clubs de danseurs et puis louer des vidéo-cassettes, ce n'est pas quelque chose qui...  ce n'est pas quelque chose qui est illégal, mais tu peux avoir une opinion et puis ça peut te déranger que des gens le fassent, avec des choses qui sont... qui ont un caractère plus illégal, avoir recours aux services de prostituées, question de voir un peu où se situe là-dedans l'échan­gisme.

146.5    Alors, c'était...  ça faisait partie un peu des paramètres.  Ça, c'est une première façon.  Ensuite de ça, il y a eu, comme j'ai mentionné tout à l'heure, la série d'opinions qu'on a (inaudible) aux gens et puis dites-moi si vous êtes d'accord ou en désaccord avec ces opinions-là.  Ça, c'est la question quatre (4) a, b, c.  Et ensuite, la question finale qui nous disait, en fin de compte là, «même si personnellement, vous ne fréquen­teriez jamais un club d'échangistes, dans quelle mesure tolérez-vous que (inaudible) légale (inaudible) activi­tés», bon, et cetera.  «Pour vous, est-ce tout à fait tolérable, plutôt intolérable ou tout à fait intoléra­ble?»  Donc, en gros, c'est les paramètres de mon étude, donc, c'est mes différentes façons de m'assurer que j'ai bien fait le tour de la question et que je peux arriver à mon client et lui dire:  bien, voici ce que j'en... voici ce que moi, j'ai trouvé et de différentes façons.  Est-ce que c'est des résultats qui sont probants ou pas, bien, c'est à lui de décider aussi là. (page71 et 72) "

146.6    " Bien moi, je vous répondrais que je suis plus à l'aise avec une question qui définit davantage, qui précise davantage ce dont on parle, à moins que l'on parle de quelque chose qu'on est certain que tout le monde connaît.  On a vu dans le sondage ici, lorsqu'on pose la question:  «Connaissez-vous, avez-vous déjà entendu parler des clubs d'échangistes?», c'étaient les deux tiers des gens qui nous ont dit oui. (page 73)"

146.7    Bon.  Donc, ce que je dis, c'est qu'on a su par une première question que vous aviez les deux tiers de l'ensem­ble de l'échantillon canadien interviewé qui nous ont dit qu'ils avaient déjà entendu parler de ça, des clubs d'échangistes, à qui ça disait quelque chose.  Au Québec, on voit que c'est quatre-vingt-dix pour cent (86%), c'est encore beaucoup plus élevé.

146.8    Si je fais mon sondage et que je ne m'occupe pas de définir de quoi on parle et puis la prochaine question, je lui demande: est-ce que le fait que des personnes fréquentent des clubs d'échangistes vous importune? C'est-à-dire, vous dérange beaucoup, assez, pas du tout?  Les gens là qui... les gens, d'une part, qui m'ont dit qu'ils n'en avaient jamais entendu parler et même les gens qui m'ont dit que oui, ça leur disait quelque chose, ça peut dire des choses différentes selon qu'est-ce qu'on a lu, qu'est-ce qu'on a vu.  Donc, moi, je préfère à ce moment-là mettre...  c'est ce qu'on dit, on a préféré mettre tous les...  c'est ce qu'on fait réguliè­re-ment dans une étude où on veut s'assurer que tous les gens qui vont répondre à une question ont la même information qui définit un peu ce que tu veux mesurer, qui défi­nit...  alors, tu présumes que c'est quelque chose que ce n'est pas tout le monde qui connaît ça et puis que les gens vont pouvoir donner différentes définitions à ça et puis là, quand ils vont dire ça me dérange ou ça ne me dérange pas, un peu, beaucoup, à quoi ils pen­saient quand ils ont dit ça me dérange ou ça ne me dé-range pas?  Est-ce qu'ils avaient en tête une idée exacte ou une certaine idée de ce que c'est que les prati­ques échangistes?  Moi, je préférais et je préfère toujours que l'on s'entende pour donner une même définition à tout le monde.  On peut être d'accord ou pas avec cette définition-là, mais moi, j'ai essayé de prendre la définition avec la meilleure... les meilleu­res informations que je pouvais avoir pour définir ce qu'était un club d'échangistes.

146.9    Maintenant, moi, je suis plus confiant dans les résultats posés après avoir précisé cette question-là. " (pages 74 et 75)

146.10" Par contre, ceux qui en avaient aussi entendu parler, qui étaient les deux tiers, ils pouvaient en avoir entendu parler d'une autre façon que la définition qu'on donne ici.  Donc, on a voulu donner la même définition à tout le monde."(page 76)

147.        Ce qui permet au tribunal de conclure que, lorsqu'il apprécie la valeur probante du sondage, il doit prendre en considération que le sondage répond à la question telle que formulée uniformément à tout le monde, nonobstant ce que les gens ont pu avoir comme conception ou préjugé.

148.        Si cette définition ou description du club échangiste qui est toléré par la société canadienne contemporaine correspond sensiblement à ce qui se déroulait au club échangiste Brigitte et Michel, le tribunal devrait logiquement conclure que:

148.1    ce qui se passait chez Brigitte et Michel correspond à ce qui est décrit dans le sondage;

148.2    ce qui est décrit dans le sondage est toléré par la société canadienne contemporaine;

148.3    donc ce qui se passait chez Brigitte et Michel est également toléré par la société canadienne et contemporaine et ne pouvait pas constituer des actes indécents

148.4    Par conséquent s'il n'y a pas d'actes indécents, il n'y a pas de maison de débauche et les accusés doivent être acquittés.

149.        À la page 79 l’expert Gauthier établit dans son champ d'expertise, qu'un club échangiste tel que défini dans le sondage, correspond à un endroit ayant un caractère privé qui découle du fait que le sondage parle d'un local "réservé à cette fin".

150.        De cette preuve, le tribunal doit conclure que le caractère « privé » d’un club échangiste comme Brigitte et Michel a un caractère et un contexte plutôt « privé » que « public » puisque les activités qui s’y déroulent sont à la fois réalisées dans un local qui leur est « réservé » et que tout se déroule "hors de la vue du public" qui ne voudrait pas se faire imposer une telle activité.

151.        Le tribunal doit également conclure que ce n’est pas le nombre de personnes  présentes ou participantes à ces activités qui donne le caractère privé ou public de ces activités.

152.        Par exemple, dans un lieu indubitablement privé qu'est une résidence, ce n’est pas parce que deux cent personnes sont en présences les unes des autres, pour des activités sexuelles ou non, que cette résidence perdrait son caractère privé pour devenir un local où des activités se déroulent en publique.

153.        De même, un endroit publique ne cesse pas d'être publique parce qu'il est vide ou parce qu'il n'y a qu'une ou deux personnes.

154.        Quand le tribunal doit déterminer le caractère public ou privé d’une activité qui pourrait être indécente, il doit prendre en considération que le public ne sera pas exposé aux dites activités d'une façon non désirée, comme cela est clairement évident dans le cas d’un parc public, d’un terrain de stationnement ( même privé mais visuellement accessible par le public), un cinéma, un restaurant, une pharmacie, une église, une quincaillerie, une centre d'achat, etc.

155.        À la page 95, en fin de la réponse 279, l’expert Gauthier établit que les gens ont bien compris la question et par conséquent le tribunal peut conclure que les réponses données au sondage sont probantes.

156.        De la page 105 à la page 113 l’expert Gauthier  démontre clairement et incontestablement que c’est bien lui le spécialiste en sondage d’opinion public qui a déterminé les questions à poser afin de pouvoir éclairer le tribunal sur ce que les répondants comprenaient comme définition uniforme et aucune preuve contraire n’a été faite par la poursuite qui a pourtant un fardeau de preuve hors de tout doute raisonnable.

157.        Aux pages 116 et 117 l’expert Gauthier établit qu’on peut présumer que les plus jeunes qui sont plus tolérants ne deviendront pas subitement intolérants en vieillissant.

158.        Le tribunal peut donc conclure qu’il est vraisemblable et raisonnable de croire que la société canadienne contemporaine qui est majoritairement composée  à 71% du groupe d'âge 18 à 54 ans ( Voir le tableau de la page 6 de D-7: (18-34 = 30 %) + (35-54=41 % = 71% ) sera tout au moins aussi tolérante en vieillissant et que par conséquent la société canadienne sera majoritairement de plus en plus tolérante.

159.        De la page 132 à 135 de son contre interrogatoire, l’expert Gauthier démontre au tribunal que la méthodologie qu’il a suivi pour faire son sondage est celle qui est la plus raisonnablement réalisable pour obtenir un résultat valable et probant dans les circonstances.

160.        Contrairement à ce que le procureur de la poursuite semble vouloir suggérer, il est irréaliste et excessif de pouvoir communiquer au répondant d’un sondage tout ce que la preuve a pu révéler au juge pendant 20 jours de procès.

161.        L’expert Gauthier qualifie « d’utopie » ( page 135) que de vouloir réaliser un sondage par la méthodologie que le procureur de la poursuite suggère dans ses questions.

162.        Le tribunal est à même de conclure que la suggestion de la poursuite est irréaliste et non conforme aux règles de l’art des sondages d’opinions publique comme l'établit l’expert Gauthier aux pages 137 et 138.

163.        De la page 143 à la page 164, l’expert Gauthier établit que la force probante d’un sondage  ressort de  l’ensemble et du recoupement des questions et des réponses qui mesureront tantôt la tolérance, tantôt le non-dérangement, tantôt le dérangement, par le fait qu’un pourcentage à une réponse doit être complété et relativisé par le pourcentage d’une autre réponse, par des volets multiples (page 148), par une variation dans les termes utilisés, par une méthodologie scientifique qui évite que certaines questions ou certaines réponses soient « polluées » (page 151) par d’autres questions ou d’autres réponses, par une gradation dans le degré de tolérance ou de dérangement (tout à fait d’accord, plutôt d’accord, plutôt en désaccord, tout à fait en désaccord, tout à fait tolérable, plutôt tolérable, plutôt intolérable ou tout à fait intolérable, peu ou pas du tout, assez ou beaucoup).

164.        Par conséquent, le tribunal est en mesure de conclure que certains pourcentages qui, représentent une tendance majoritaire moins élevé sur une question, comme 57% des gens qui ne sont pas dérangés sous un angle, doivent être lus, compris et interprétés avec les autres pourcentages aussi élevés que 78% ou 90% sur une autre question.

165.        Le tribunal peut conclure que d'exiger une preuve comme celle que la poursuite semble vouloir imposer à la défense, équivaudrait à déplacer le fardeau de la preuve sur les épaules de la défense et de lui imposer un degré de preuve contraire aux règles du fardeau de la preuve en matière criminelle.

166.        Ce n'est pas parce que la défense fait cette preuve scientifique, objective, abondante et non contredite, qu'il faut oublier pour autant que ce n'est pas à la défense de faire la preuve de sa non culpabilité.

167.        Le tribunal doit d'abord se demander si la poursuite a fait une preuve hors de tout doute raisonnable nonobstant la preuve de la défense.

168.        Quant à la preuve de la défense, le tribunal n'a qu'à déterminer si elle soulève un simple doute raisonnable.

169.        Autrement dit, à partir du moment où la police et ses avocats ont admis l'existence d'un "vide juridique" tel qu'il appert à D-2, le tribunal doit s'assurer que la poursuite a comblé ce  "vide juridique" hors de tout doute raisonnable.

170.        En toute justice et en toute équité pour les accusés, à cause de la présomption d'innocence et la Charte des Droits et Libertés, le tribunal doit faire bénéficier les accusés des conséquences de ce vide juridique que la police et les avocats de la ville ont admis tel qu’il appert au document D-2.

171.        Le tribunal est à même de constater que la preuve qui vient combler ce vide juridique provient entièrement de la preuve de la défense qui tend a démontrer que ce qui se passait au club échangiste  Brigitte et Michel semble être toléré .

172.        À la page 164 l'expert Gauthier établit une autre chose qui ne peut pas être contredite, c'est que si personne ne sait ce que les répondants du sondage avaient en tête comme autre définition, une chose est certaine, c'est que tout le monde a répondu à la même question en se basant sur une prémisse commune.

173.        À la page 166 l’expert Gauthier établit qu’à sa connaissance D-7 est "unique" et qu'il n’existe aucun autre sondage en semblable matière.

174.        Le tribunal peut donc conclure que le jugement qu’il a à rendre est basé sur une preuve "unique" et sans précédent.

175.        Par conséquent, le tribunal doit conclure qu’il serait imprudent de prendre en considération la  jurisprudence qui ne contiendrait aucune expertise en sondage d’opinion public ou une expertise en sexologie et psychologie concernant les normes de tolérance de la société canadienne contemporaine en matière de sexualité ou encore une jurisprudence qui serait désuète pour le motif qu'elle ne serait pas représentative de la tolérance qui prévalait d'une façon contemporaine en 1999.

176.        De la page 170 à la page  178 l’expert Gauthier précise le sens du mot club qu’il utilise dans son sondage :

176.1    " Pour moi, un club, les définitions que vous donnez, elles ont toutes en commun le fait que c'est des gens qui s'associent autour d'un objectif commun et qui savent qu'ils partagent des choses en commun, donc, je pense que le mot club déjà, c'est...  en anglais, c'était «swinger club», je pense, qu'on avait...  «swinger club».(page 171)

177.        Aux pages 173 et 178 l'expert Gauthier établit le caractère privé d'un club échangiste tel que défini dans son sondage et qui correspond à ce qui existait concrètement chez Brigitte et Michel:

177.1    "A la toute fin de...  le message et, à la toute fin, quand on dit aux gens «de voir ou de participer à (inaudible) sexuelle explicite en groupe dans un établissement prévu à cette fin, qui leur est réservé.  Ces activités se font à l'abri du regard du public ne désirant pas y assister et y participer».  C'est dans ce sens-là que moi, je me dis: il me semble que si je mets tout ça ensemble, ça fait assez privé, en tout cas, ma définition de privé à moi là. (173)

178.        Il fait bien la distinction entre un club échangiste ainsi défini et avec un autre genre de club où le public aurait un droit accès comme dans un club de danseuses ou de danseurs où n'importe qui peut aller boire une bière dans un établissement détenant un permis d'alcool:

178.1    " on dit un club de danseurs, mais c'est quand même un édifice, un endroit public, parce que tu vas...  ce n'est pas à l'abri du regard de tout le monde quand tu vas là.  Tu vas là, tu paies, tu achètes ta bière, bon, et puis tu assistes au spectacle.  Ça, c'est un club qui, à mon avis, si on me pose la question à moi, c'est un établissement public, comme aller au cinéma, comme aller, bon... (inaudible) établissement public.(178)

179.        Par conséquent, le tribunal peut conclure que le sondage démontre  que les droits fondamentaux d’association, de partage d’intérêts communs, de regroupement d’affinités, de liberté de penser sont en jeu dans le présent dossier et que le tribunal doit prendre en considération des droits et libertés des gens que la Chartre garantit aux gens qui s'associent en se réunissant dans un club échangiste.

180.        C'est précisément en vertu de la Charte  des Droits et Libertés que, en toute justice et équité pour les accusés, le tribunal doit faire bénéficier la défense et les accusés des conséquences de ce vide juridique que la police et les avocats de la ville ont admis tel qu’il appert au document D-2.

181.        Aux pages 179 à 182, l’expert Gauthier établit le caractère scientifique, objectif, réaliste, conforme aux règles de l'art de son sondage:

181.1    "Je pense que la principale qualité d'un sondage que j'ai essayé d'établir depuis le début de mon témoignage, c'était un sondage... une opération qui respecte l'art, l'art des sondages, donc, qui respecte les règles de l'art.  Il y a un certain nombre de règles de l'art que j'ai expliquées: de bien définir ce qu'on veut étudier, de bien préciser quelle population on veut évaluer et d'en tirer un échantillon selon aussi des méthodes bien... qui sont bien connues et qui existent et ensuite de ça, faire un questionnaire, et mettre des questions dans un questionnaire qui sont, au meilleur de notre connaissance, les questions les plus objectives possi­ble, les plus neutres possible et qui vont nous aider à obtenir l'information recherchée, je dis bien l'infor­mation et non pas les genres de réponses qu'on aimerait avoir, mais l'information qu'on cherche et qu'on puisse ensuite la quantifier.  En gros là, c'est ça.  (Inaudi­ble), la supervision, et cetera.

181.2    Q20 Est-ce que, pour utiliser votre expression des règles de l'art, est-ce qu'il est dans les règles de l'art de, par exemple, donner de l'information sur le mot à mot de ce qui est dit pendant un mois dans une cour de justice, de montrer des documents, est-ce que c'est selon les règles de l'art de faire ça dans un sondage selon les règles de l'art?

181.3    R Non.  Mais (inaudible) faire un sondage, ça ne serait aucunement dans les règles de l'art.  Justement, un sondage doit essayer de résumer le plus brièvement possible et avec le meilleur choix de mots possible ce qu'on veut...  ce sur quoi on veut que les gens se prononcent." (page 179-180).

181.4    Ah bien, c'est des questions que nous avons composées, que nous avons proposées à partir de, comme je disais ce matin, que vous me donniez un peu d'information sur qu'est-ce que vous voulez, c'est quoi le but de l'étude là.  Et aussi, moi, je sais que j'ai fait préciser des choses au niveau de qu'est-ce qu'était, comment on pouvait le mieux définir un club échangiste et à partir un petit peu des discussions qu'on a eues là-dessus, on a fait des libellés de questions et puis on a (inaudi­ble), on a arrangé, il manque ci, il manque ça.  Je vous rappelle qu'au début, il y a plein de trucs que vous m'avez mentionnés.  Donc, je pense qu'on a essayé de faire la définition et puis lorsqu'on l'a adoptée, je vous ai dit et on s'est dit:  «Est-ce qu'il manque une affaire importante là-dedans que si on ne dit pas aux répondants, ça fausse les résultats de l'étude?»  Et on s'est dit:  «Non, tout est là.  Le caractère que c'est des gens qui se réunissent en groupe pour faire quoi, pour faire des activités sexuelles explicites en groupe, dans un établissement qui leur est réservé, à l'abri des yeux et du regard du public qui n'est pas... qui n'a pas envie de voir ça ou d'y aller». Bon.  Alors, on s'est dit:  «C'est des adultes, en plus, et puis avertis et consentants».  Bon.  Je pense que tous les mots étaient là pour définir ce que j'ai compris qu'on voulait...  ce sur quoi on voulait que les gens se prononcent." (pages 180-181).

182.        Ce n'est pas compliqué à comprendre: la définition et les questions ont été formulées selon ce qui se déroulait au club échangiste Brigitte et Michel et on a voulu savoir dans quelle mesure la société canadienne et contemporaine tolérait ou non une telle situation.

183.        Devant cette preuve positive et non contredite et devant l'absence totale de preuve de la part d'un expert que la poursuite aurait pu faire témoigner, le tribunal se doit de considérer que le sondage D-7 est probant d'une façon prépondérante et non contredite et qu'il fait preuve de son contenu.

184.        Il suffit que cette preuve soulève un doute raisonnable pour entraîner un acquittement.

185.        Il ne faut pas s'attendre ni se surprendre que le sondage ne dise pas que 100 % des gens vont tolérer l'échangisme car en démocratie, chaque personne a un droit fondamental à la liberté de pensée. Les échangistes n'essaient pas d'imposer leur culture ou convaincre les autres d'adhérer à cette culture ou à ce style de vie.

186.        Les échangistes demandent tout simplement que les policiers, les autorités et les autres canadiennes et canadiens respectent leur droit fondamental à la différence et que le tribunal indique à la société canadienne et contemporaine qu'il n'y a aucune loi qui interdit l'échangisme et que la culture échangiste en est une de respect et que les échangistes veulent tout simplement vivre leur vie sans déranger personne et que personne ne les dérange.

187.        Il n'y a pas de perversion, de pathologie, de déviance, de prédateurs sexuels, d'exploitation de la femme, ni de violence dans la culture échangiste et qu'au contraire la preuve démontre que les échangistes sont plutôt de simples badauds qui veulent s'amuser entre eux dans le respect de règles d'éthique et dans un endroit suffisamment privé pour ne pas déranger les autres.

188.        L'intérêt de la société en général, de la justice en particulier et de la police qui reconnaît l'existence d'un "vide juridique", c'est de déterminer un certain encadrement qui permettra à la fois à la société de ne pas être dérangée et aux adeptes authentiques de l'échangisme de pouvoir jouir de leur droit en toute tranquillité d'esprit dans un endroit qui est clairement identifié et qui leur est réservé.

189.        Comme nous l'avons déjà dit, la démocratie ce n'est pas la dictature de la majorité de 50 % plus un. La démocratie c'est le respect des minorités.

190.        De la page 193 à 199 l’expert Gauthier établit encore une fois, le caractère privé des clubs échangistes comme celui de Brigitte et Michel sur lequel porte son sondage.:

190.1    " Décrit ici?  Oui, «établissement prévu à cette fin qui leur est réservé, à l'abri du regard du public ne désirant pas y assister ou participer», à mon avis, c'est privé.  C'est privé.

190.2    Tout comme tout à l'heure, je crois qu'on a parlé c'est quoi la différence entre le privé et puis le public là.  Le privé, c'est quelque chose où, par opposition, par exemple, je ne sais pas, moi, si des gens se rencontrent dans un endroit, je ne sais pas, moi, un stationnement, un parking ou un endroit où tout le monde peut voir ce qui s'y passe et même si tu n'as pas envie de le voir ou de participer, tu es pris pour voir, sinon partici­per, là, pour moi, ça devient... là, c'est clair que c'est public.  Maintenant, si tu es dans un établisse­ment, un local, un lieu, un espace où ne se retrouvent que des gens qui savent, quand ils vont là, qui savent pourquoi ils y vont, qu'est-ce qu'ils vont trouver là et qui ont envie d'être là en commun et que tu n'entres pas là comme dans un moulin, d'après moi, ça correspond à du privé pour moi." (pages 194-195)

191.        Si le mot "club" pouvait porter à confusion quant à son caractère privé, selon qu'on l'applique à un club des danseuses nues ou à un club échangiste, la preuve suivante, que l'on retrouve aux pages 198 et 199, dissipe tout doute et illustre bien que dans le cas d'un club échangiste il s'agit bien d'un lieu perçu, conçu, voulu et destiné à des activités dans un contexte à caractère privé par opposition à un club de danseurs ou de danseuses (surtout avec un permis d'alcool) :

191.1    " Bien, si on me parle des clubs danseurs et danseuses comme ceux dont nous parlions ici dans le sondage, ce sur quoi j'ai interrogé les gens, moi, à mon avis, c'était clair que c'était... un club de danseurs, c'est un club public.  C'est public, je peux y entrer, vous pouvez y entrer, bon, n'importe qui peut y aller.  Pour moi, c'est public, on peut y aller, ça a pignon sur rue, il y a une affiche et puis, bon...  on n'a qu'à se pro-mener, on voit... on voit bien, c'est bien clair.  Ça, c'est... pour moi, c'est public parce que n'importe qui peut y entrer, à condition d'avoir l'âge requis, dix-huit (18) ans et puis il n'y a personne qui va t'inter­dire, tu prends une bière, tu regardes le spectacle et puis...  C'est public.  N'importe qui peut y aller.  Tu n'as pas besoin d'être membre, tu n'as pas besoin de...  ce n'est pas un club au sens association où tu vas là.

191.2    Ce n'est pas...  je ne m'attends pas nécessairement à rencontrer des connaissances si je vais là, tu sais.  (Inaudible) rencontrer.  Alors que dans un club, un club... on parle de club d'échangistes, il y a des affinités en commun qui vont faire que probablement qu'à force d'y aller, tu vas finir par rencontrer des gens et puis ça devient...  ça peut correspondre, jusqu'à un certain point finalement, à la définition de club... les différentes définitions de club qu'on a mentionnées tout à l'heure là, des gens qui ont des affinités ensemble.  C'est sûr que quelqu'un qui va dans un club de danseurs ou danseuses nues, il a le goût de voir ça, mais ça ne fait pas un club...  ça ne fait pas des gens qui y vont, un club d'appartenance là.  

192.        Bien entendu, le juge est celui qui doit déterminer « juridiquement » le caractère et le contexte privé des clubs échangistes en question, mais pour rendre son jugement sur ce sujet, il doit prendre en considération la preuve établie devant lui par les experts et qui viennent établir que leurs expertises ont pris en considération les notions « privé » et « public » et que par conséquent, ces experts sont en mesure d’émettre une opinion sur le caractère « privé ou public » dans le cadre de leur champs de compétence.

MICHEL CAMPBELL LE 28 MAI 2002

 

193.        À la page 26 il donne la définition de l’échangisme en précisant qu’il existe une définition plus large incluant l’interaction entre les couples et des personnes seules.

194.        De la page 27 à la page 45, il précise certains passages de son expertise D-12, D-12.1, D-12.2.

195.        Aux pages 23 et 24 il établit les faits qui lui ont été soumis comme preuve au dossier en les résumant de la façon suivante :

195.1     “Donc, pour l'essentiel, on m'explique que ces ébats sexuels consistaient à faire l'amour en groupe, des pré-liminaires à la pénétration, y compris des gestes de masturbation, de cunnilingus, de fellation et d'éjacula­tion, sans exclusion de voyeurisme et d'exhibitionnisme.”

195.2    “ Ils se présentaient à l'établissement avec leur alcool et payaient le prix d'entrée au portier à l'entrée, qui leur demandait s'ils avaient des questions.  A l'inté­rieur, les gens discutaient, fraternisaient et faisaient connaissance durant la soirée.”

195.3    “Ultérieurement, s'ils en avaient envie, les gens s'invitaient à participer à diverses activités sexuelles collectives.”

195.4    Les personnes qui se retrouvaient à l'intérieur des établissements étaient averties et consentantes et aucune d'entre elles ne s'est plainte de quoi que ce soit.  Toutes les activités sexuelles collectives se faisaient à l'abri du regard du public ne désirant pas participer ou y assister.  Aucune violence n'a été remarquée sur les lieux.  Les échangistes qui se trouvaient sur les lieux représentent à peu près tous les groupes d'âge.”

195.5    ”Donc, nous avons pris connaissance d'une partie de la preuve, notamment les pièces P-16.1, P-17.1, P-44, c'est une cassette vidéo préparée par les agents doubles dé-montrant les ébats sexuels des échangistes.”

195.6    “Et le visionnement de la cassette vidéo D-5 de l'émis­sion Sexe et Confidences diffusée le dix-neuf (19) novembre dix-neuf cent quatre-vingt-dix-neuf (1999) à treize heures (13h00).

196.        À la page 24 il décrit son mandat de la façon suivante :

196.1     “O.K.  D'abord, le mandat était de déterminer si les deux (2) établissements visés dans les dénonciations abri­taient des activités qui outrepassent le seuil de tolérance de la société canadienne contemporaine.”

197.        À la page 26 il définit l’échangisme qui inclut également des célibataires dans sa définition la plus large, qui correspond à la réalité qui existait au club échangiste Brigitte et Michel:

197.1    “L'échangisme, c'est une entente entre personnes, la plupart du temps des couples ou des conjoints de fait ou des conjoints avec un contrat marital, contrat légal, qui s'entendent entre eux pour avoir des interactions sexuelles et échanger leur partenaire.  Dans certains cas, l'échangisme se fait avec les partenaires de la relation de couple, mais il peut y avoir également d'autres personnes qui se joignent au quatuor, par exemple, ou encore ça peut être plus en termes de trio.  Par exemple, un couple qui accueille une autre personne dans leur relation de couple pour avoir des interactions sexuelles.”

198.        À la page 32 il éclaire le tribunal quant à la période à laquelle le juge doit se référer pour déterminer le caractère contemporain de la norme de tolérance:

198.1    Maintenant que le phénomène religieux est tombé en Amérique, je pense d'une façon assez importante depuis les vingt (20) dernières années, on s'est aperçu qu'il y a toutes sortes de comportements qui émergent.  Par exemple, l'homosexualité a été légalisée, maintenant même on donne des droits aux homosexuels.  Il y a eu des décisions, par exemple, de certains tribunaux au Canada qui ont permis aux homosexuels, par exemple, d'être des conjoints ou d'être des...  c'est-à-dire d'avoir un statut de conjoint et j'en parle peut-être pour vous informer plus précisément là-dessus.  Un autre indica­teur, par exemple, si je peux poursuivre cette idée-là, c'est que la tolérance des Canadiens et des Canadiennes sur, par exemple, l'homosexualité, c'est le jugement de la Cour Suprême du Canada qui reconnaît aux couples de même sexe les droits accordés aux conjoints de fait.  C'est ce que j'étais en train d'expliquer.

199.        À la page 32 l’expert Campbell explique que c’est précisément cette évolution de la tolérance en matière de sexualité durant les 20 dernières années qui explique tout simplement pourquoi la société canadienne contemporaine tolère les activités sexuelles comme celles qui se déroulaient chez Brigitte et Michel :

199.1    “Alors, ça, c'est des choses nouvelles qu'on s'aper­çoit.  Donc, une plus grande tolérance face à l'homo­sexualité, une plus grande tolérance face aux relations sexuelles extra-conjugales, également une plus grande tolérance face à la sexualité comme l'échangisme.”

200.        Par conséquent, il est raisonnable de conclure que le tribunal ne doit pas appliquer la jurisprudence concernant des évènements survenus au début des années 80 ou avant, lorsque viendra le moment de déterminer le seuil de la tolérance contemporaine.

MICHEL CAMPBELL LE 30 MAI 2002

 

201.        De la page 5 à la page 10, l’expert Campbell explique que l’évolution des mœurs a été fortement influencée par l’Église qui avait ‘’une emprise très importante’’ (page 7).

202.        Ce qui a fait évoluer la tolérance de la société canadienne quant aux activités à caractère sexuel, ce sont notamment les artistes et les scientifiques : ‘’Les scientifiques disaient, bien, la masturbation, c’est naturel, c’est normal. L’église disait que c’était un péché, c’est grave’’ (page 8).

203.        A la page 9 il explique à quel point  la masturbation en particulier, et les activités menant à l’éjaculation, étaient intimement reliés au caractère reproductif des relations sexuelles :

203.1    ‘’L’ancien Testament, ça c’est avant Jésus-Christ. À l’époque on croyait que le scrotum était un sac avec des semences de la vie, parce que que dans la Bible, on parle de la semence de la vie, comme c’est des graines qu’on peut utiliser pour ensemencer la femme. Ce qui n’était pas bête à l’époque.  Et on se disait à l’époque, bien, si on gaspille toutes ces graines là, il n’en restera plus. Et donc, c’est dangereux pour la survie de l’espèce.  Alors, on se doit de ne pas gaspiller cette semence là en se masturbant ou en l’utilisant à l’extérieur d’un contexte de procréation’’.

203.2    «Et donc, toute l’idée dans l’église était qu’il ne faut pas faire ça, c’est dangereux ».

204.        Mais la science  est venue tout révolutionner de la façon suivante en venant « contredire ce que l’église disait » (page 10) :

204.1    « Et dans chaque éjaculation, on peut retrouver à peu près trois cent cinquante millions (350,000,000) de spermatozoïdes. »

204.2    « Alors, si on se masturbe, on ne tue pas la semence de la vie, parce qu’elle va se suicider ou mourir de sa belle mort de toute façon et que, si on se masturbe à tous les jours il y en aura toujours d’autres. »

204.3    « Alors, ça a comme révolutionné ça, ce qu’on pensait dans les passages bibliques et puis ce que la science nous disait. » 

205.        Vient alors le caractère récréatif qui prend de l’importance car, comme l’affirme l’expert Campbell, si les humains se masturbent et aiment les relations sexuelles, c’est : « parce que c’est agréable, ça soulage la tension, » (page 11) .

206.        A la page 11,  l’expert Campbell explique pourquoi l’évolution de la tolérance en matière sexuelle évoluent parfois lentement : « avant que ce soit intégré dans le peuple, bien, ça prend un certain temps ».

207.        L’attitude des policiers face aux échangistes est en quelque sorte un reliquat de cette ancienne culture  alors que la société évolue d’une façon plus ouverte et plus réceptive.

208.        De la page 11 à la page 21 l’expert Campbell décrit d’une façon logique, précise et abondamment illustrée à quel point la société canadienne contemporaine a fortement évoluée en tolérant davantage les activités à connotations sexuelles.

209.        Le tribunal est en mesure de comprendre pourquoi les adeptes de la culture échangiste sont tolérés dans la société eu égard à l’évolution de la société canadienne face au caractère récréatif des activités sexuelles compte tenu de la preuve suivante qui apparaît à la page 21 du témoignage de l’expert Campbell le 30 mai 2002 :

209.1     “ Et aussi, donc, l’Église avait une emprise très importante sur ce qui se passait dans les chambres à coucher.  Évidemment, s’il y avait trop de plaisir, c ’était vu comme un péché. Donc, le plaisir dans la sexualité conjugale était vu comme un péché, alors que maintenant, nos valeurs ont tellement changées, que maintenant,  la sexualité conjugale, surtout depuis la venue de la pilule, ça, ça a été un fait marquant, je pense, dans l’histoire, la pilule anticonceptionnelle.  Quand c’est arrivé,  pour la première fois, là, je pense, dans l’histoire de l’humanité on pouvait faire l’amour, pas pour des raisons procréatives, parce qu’en prenant la pilule, on ne pouvait pas faire d’enfant, mais pour des raisons récréatives .”

209.2    “ Donc, dans le début des années soixante (60), la sexualité est devenue plus récréative et la pilule a permis que ce soit plus récréatif. ”

210.        De la page 22 jusqu’à la page 101 de son témoignage rendu le 30 mai 2002, l’expert Michel Campbell a démontré d’une façon prépondérante, convaincante, logique, rigoureuse, scientifique, raisonnable, vraisemblable et non-contredite que le seuil de tolérance de la société canadienne contemporaine ont grandement évolués et il n’est donc pas surprenant qu’une majorité de la société canadienne contemporaine n’est pas dérangée par le fait que d’autres adultes d’âge légale, avertis et consentants puissent avoir des activité sexuelles explicites en groupe dans un établissement prévu à cette fin à l’abri du regard du public.

211.        À la page 29 de la transcription du 30 mai 2002, l’expert Campbell dit quelque chose qui guide le tribunal quant à la période de référence pertinente que le juge doit prendre en considération pour déterminer le caractère contemporain de la norme canadienne :

211.1    “Alors, dans le congrès de deux mille deux (2002) et dans le congrès de mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf (1999), on disait que l’internet a révolutionné nos valeurs sexuelles et ça commence, on appelle ça maintenant la renaissance sexuelle, alors que dans les années quatre-vingt (80), on disait la révolution sexuelle. La renaissance, ça veut dire maintenant, on a accès à plein d’informations sur la sexualité, des techniques de masturbation, des "chat lines", des groupes de discussions sur toutes sortes de thèmes, sur l’homosexualité, l’échangisme… Alors, pouvez vous imaginer, quand on a presque cinq millions (5 000 000) de liens, il y en a sur plein de sujets”

212.        À la page 36 de la transcription du 30 mai 2002, l’expert Campbell ajoute que l’impact de l’internet qui entraîne cette ouverture d’esprit “est quand même un phénomène relativement récent là, dans les dix (10), quinze (15) dernières années et de plus en plus augmente.”

213.        Le tribunal soit donc éviter d'appliquer la jurisprudence du début des années 80 puisqu'elle est antérieurs à ces " dix (10), quinze (15) dernières années".

214.        À la page 36 de la transcription du 30 mai 2002, l’expert Campbell illustre l’impact de l’internet sur l’évolution des mœurs en concluant : “ … quand on fait des études sur les adolescents et sur les adultes, c’est qu’ont voit que maintenant, la sexualité récréative c’est beaucoup plus à la vogue, c’est beaucoup plus accepté.”

215.        Au soutien de sa conclusion, à la page 40 de la transcription du 30 mai 2002, l’expert Campbell réfère à la cassette de l’émission de télévision “Enjeux” produite sous la côte D et qui parle de l’échangisme au sujet de laquelle il conclut :

215.1    “À mon opinion, ça peut vraiment illustrer à la cour comment ça a évolué les valeurs sociales, sexuelles, concernant la sexualité.”

216.        Pour déterminer le caractère contemporain du seuil de tolérance que la Cour Suprême exige, le tribunal doit donc prendre en considération que depuis la révolution sexuelle des années 80, il y a maintenant une renaissance sexuelle qui semble donner une plus grande ouverture d’esprit et une plus grande tolérance en matière de sexualité à fin de 1999 et au début de 2000.

217.        Par conséquent, le tribunal se doit de considérer uniquement la jurisprudence la plus récente possible et s’éloigner de la jurisprudence des années 80 qui ne prend pas en considération l’évolution des mœurs qui a s’est développée durant les 20 dernières années.

218.        Pour faire une analyse juridique contemporaine du seuil contemporain de tolérance dans la société canadienne, le tribunal doit prendre en considération que la tendance à la laïcisation a entraîné une libéralisation des mœurs et une diminution de l’influence des normes religieuses.

219.        La preuve démontre qu’aujourd’hui, la société canadienne reconnaît que la vie sexuelle est une question individuelle intime.

220.        Premièrement, tel qu’il appert à la page 17 du sondage D-7, 78 % des gens sont tout à fait d’accord ou plutôt d’accord avec la norme voulant que les adultes peuvent vivre leur vie sexuelle comme ils l’entendent, du moment qu’ils ne dérangent personne.

221.        Deuxièmement, à la page 32 de son témoignage du 30 mai 2002, l’expert Campbell vient corroborer cette conclusion en témoignant à l’effet suivant :

221.1    Maintenant, il y a eu un changement dans les valeurs, où on accepte de plus en plus que la sexualité soit quelque chose qui appartient aux individus et qu’ils puissent la vivre comme ils veulent.”

MICHEL CAMPBELL LE 30 SEPTEMBRE 2002

 

222.        Aux pages 5 à 7 il vient corroborer le sondage démontrant que ce qui se passait chez Brigitte et Michel n’outrepassait pas le seuil de tolérance de la société canadienne contemporaine :

222.1    “Bien, je posais directement la question aux gens.  Je disais:  "Vous, qu'est-ce que vous pensez des gens qui ont des pratiques sexuelles où ils échangent soit des couples ou des individus qui ont des interactions sexuelles en groupe lorsque c'est fait dans un endroit où les personnes sont consentantes, où les personnes sont avisées et même donnent un consentement éclairé (inaudible), vous, est-ce que ça vous dérange, ça?"

222.2    “Je me souviens pas d'une personne qui m'a dit que ça les dérangeait.  Ils disaient:  "En autant qu'ils font leurs affaires et qu'ils nous achalent pas avec ça", grosso modo, ça semble pas les affecter.”

223.        Aux pages 7 et 8 l’expert  Campbell établit toute l’importance et la valeur probante qu’il accorde au sondage CROP D-7 :

223.1    “Bien, il y a pas beaucoup de recherches empiriques sauf des sondages comme le Sondage CROP, je pourrais dire, qui est probablement le plus scientifique.  Et, d'ail­leurs, à cet effet-là, moi, quand j'ai accepté mon mandat, une des exigences que j'avais face aux avocats, c'est que j'ai dit:  "Moi, j'ai une opinion là-dessus d'après mon expérience en sexologie.  Mais ce que je vous demande, c'est d'aller chercher un sondage sérieux avec une compagnie sérieuse.  Et si ce sondage-là reflète ce que, moi, je pense, moi, je vais participer."

223.2    “Et ils ont fait les démarches nécessaires pour aller chercher un sondage sérieux auprès de la population canadienne.  Et quand j'ai vu les résultats, j'ai tout simplement constaté que ça reflétait à peu près ce que je pensais, donc ça m'a pas étonné comme résultat.”

223.3    “Et, là, bon, bien j'ai dit:  "Là, on a des données objectives et, moi, j'ai une vision de la situation."  A­lors, les deux (2) ensemble donnent une vue d'ensem­ble de ce que... comment les gens se sentent face à l'échan­gisme.”

223.4    “Donc, au niveau des résultats du sondage, ça correspond à peu près aux connaissances, votre expertise au niveau de l'appréciation de (inaudible) au niveau des échangis­tes?”

223.5    “Oui.”

223.6    “Au niveau pan-canadien?”

223.7    “Au niveau pan-canadien, oui.”

224.        Le tribunal se doit d’accorder un degré très élevé de crédibilité et de force probante à cette preuve scientifique, objective et sérieuse, d’autant plus que c’est l’expert Campbell lui-même qui l’a exigée, qui l’a endossée car elle venait corroborer son opinion en tant qu’expert en sexologie et en psychologie dont la compétence en matière de normes de tolérance de la société canadienne est reconnu par la Cour Suprême du Canada dans la cause de Tremblay.

225.        Le tribunal se doit aussi d’ajouter que cette preuve de la défense qui est déjà très volumineuse et abondante, n’est aucunement attaquée ni contredite par quelque preuve scientifique, objective ou sérieuse que ce soit.

226.        À la page 11, l’expert Campbell met en preuve que les échangistes ont le respect des autres et de soi-même et que cela passe par l’usage et la promotion du condom :

226.1    “Oui, concernant le condom, par exemple, il y a eu un sondage qui a été fait chez les échangistes.  Alors, dans la convention ou dans le congrès de mil neuf cent quatre-vingt-seize (1996) qui a eu lieu, je crois que c'était aux États-Unis, on a demandé aux gens qui participaient à ce congrès-là sur l'échangisme.

226.2    Et voici ce qu'on en dit:

226.2.1"One (inaudible) at the lifestyle nineteen ninety-six (1996) convention would even­tually show that ninety-two per cent (92%) of three hundred and twelve (312) respon­dents believe the swingers should be using condoms and at seventy-seven per cent (77%) have had HIV test."

226.3    Alors, les gens, en général, dans le secteur de l'échangisme sont des gens qui prônent la sexualité protégée, donc l'utilisation d'un condom pour se protéger.” 

227.        Cette preuve vient d’une part corroborer les dires des accusées qui affirment que chez Brigitte et Michel on encourageait et on utilisait les condoms comme on en voit sur des photos produites et d’autre part elle vient répondre à la préoccupation de la police et de la société quant la protection de la santé publique.

228.        Tout au long de son témoignage l’expert Campbell a mis en preuve d’une façon non contredite, que l’échangisme  et la sexualité de groupe ne sont pas des comportements pathologiques (page 13), ni antisociaux (page 15), ni malsains (page 17) et qui ne fait l’objet d’aucune protestation (page 18) et que ces comportements n’outrepassent pas le seuil de tolérance de la société canadienne et contemporaine :

228.1    “Alors, à mon avis, ça montre, encore une fois, que la société canadienne et la société américaine aussi, nord-américaine, est assez tolérante face à de tels comportements.

229.        À la fin de la page 25, l’expert Campbell fait donc ainsi écho au sondage CROP qui corrobore sa propre opinion :

229.1    “Oui, je pense que les conclusions de ce sondage-là, c'est que le peuple canadien est tolérant face à l'échangisme ou aux clubs d'échangistes.”

230.        De la page 25 à la page 43, l’expert Campbell donne de nombreux exemples à l’appuie de cette conclusion qu’il fait sienne. Il réfère notamment à Terry Gould de Vancouver, qui est une sommité du milieu journalistique canadien l’auteur d’un livre sur la culture échangiste intitulé : “The Lifestyle : a look at the erotic rites of swingers” et dont il partage l’opinion et dont il dit:

230.1    “ … je pense que monsieur Gould donne vraiment l'impression... une impression réaliste de qu'est-ce qui se passe dans le monde de l'échangisme.”.

230.2    “ Oui, je partage son opinion relativement à l'idée que les gens sont de plus en plus tolérants face à l'échan­gisme et que les gens sont de plus en plus tolérants face à de telles pratiques.”

231.        Aux page 67 et 68 l’expert Campbell fait sienne la définition du sondage D-7 de CROP et qui vient corroborer son opinion :

231.1    “ Alors, on a, à la page 15, "Définition d'un club échangiste", là, d'accord.  Alors, on s'entend sur la définition qui a été utilisée lors du sondage de CROP, on va utiliser le (inaudible) à la Cour pour vous:

231.2    "Comme vous le savez peut-être, des adul­tes d'âge légal, avertis et consentants, se retrouvent pour voir ou participer à des activités sexuelles explicites, en groupes, dans un établissement prévu à cette fin qui leur est réservé.  Ces activités se font à l'abri du regard du public ne désirant pas y assister ou y participer."

231.3    D'accord?

231.4    Oui.

231.5    Est-ce que cette définition-là, c'est une définition qui vous convient, vous, dans votre compréhension des choses?

231.6    Oui, ça me convient.

231.7    Est-ce que ça vous convient dans le cadre de l'expertise que vous avez faite?

231.8    Oui.

231.9    Est-ce que ça vous convient dans le cadre du témoignage relativement au dossier qui nous concerne aujourd'hui?

231.10Oui.

231.11Est-ce que vous voulez dire à la Cour quelle est votre conclusion à vous, comme sexologue, psychologue, reconnu par la Cour suprême comme étant un témoin expert pour déterminer la norme de tolérance de la société cana­dienne...

231.12

231.13Est-ce que, effectivement, vous pouvez dire à la Cour quelle est votre conclusion par rapport à la tolérance de la société canadienne?

231.14Ma conclusion, c'est que la société canadienne tolère les clubs échangistes tel que défini par le sondage CROP.”

232.        Quand l’expert Campbell conclut que cette tolérance concerne “ les clubs échangistes tel que défini par le sondage CROP ”, il ne réfère pas seulement aux couples mais il inclut la définition plus large qui inclut les célibataires et les groupes, tel qu’il appert à la page 90 :

232.1    “Oui, la plupart du temps, il y a une entente entre le conjoints relativement au souhait de vivre une expé­rience d'échange au sein de leur couple.  Donc, c'est un contrat, une entente — on pourrait appeler ça une entente — un contrat ou une acceptation mutuelle d'avoir des comportements, de partager des comportements sexuels avec d'autres couples, un autre ou d'autres couples ou d'autres personnes.”

233.        De la page 68 à la page 90 l’expert Campbell donne de nombreuses précisions et illustrations au soutien de son opinion que ce soit dans les média électroniques, dans les revues, dans les journaux, les vidéocassettes, etc. et qui lui permettent de conclure que la société canadienne contemporaine a beaucoup évolué et incluant les années 90 :

233.1    “Ce que je trouve dans ce rapport-là, par exemple, c'est la révolution sexuelle contemporaine, à partir de la page 18, donc le début du siècle, les années cinquante ('50), soixante ('60), soixante-dix ('70), quatre-vingt ('80) et quatre-vingt-dix ('90).

233.2    Ce que j'en conclus à la lumière de l'étude de ces années-là, en termes d'évolution des valeurs sexuelles, des mœurs sexuelles, j'en conclus que la société canadienne est beaucoup plus tolérante qu'elle ne l'était et au fil du temps, la tolérance augmente relati­vement à divers comportements sexuels et plus particu­liè­rement à l'égard de l'échangisme.

233.3    Alors, est-ce que vous pourriez faire part à la Cour de votre conclusion complète par rapport à la différence qui vous concerne (inaudible) relations sexuelles échangistes (inaudible) à la page 35 de votre rapport?

233.4    Votre conclusion, vous dites le résumé ou...

233.5    On va le donner au juge lorsqu'on le produira, le résumé, si vous voulez, on produira...

233.6    Oui, je viens juste de le résumer et je l'ai résumé tout au long de mon témoignage, c'est que, essentiellement, les gens sont plus tolérants face aux comportements sexuels, à mon avis.  Les valeurs sexuelles sont beaucoup plus étendues en ce sens que les gens acceptent davantage les particularités sexuelles en autant que c'est entre adultes consentants et libérés et en autant que c'est pas avilissant et en autant que ça implique pas des enfants.

233.7    Et que la tendance générale, dans la société cana­dienne, relativement à l'échangisme, la société cana­dienne est de plus en plus tolérante face à l'échangisme et face aussi à des scénarios sexuels qu'on peut voir à la télévision, qu'on peut voir dans les revues, qu'on peut voir dans la plupart des média et même des thèmes qui sont abordés dans les différents média.

233.8    Les gens sont de plus en plus tolérants, acceptent la sexualité comme quelque chose qui n'est pas nécessai­re­ment négatif ou mauvais ou péché, mais plutôt comme un moyen de s'épanouir en autant que c'est dans le respect."

234.        Or, l’ensemble de la preuve démontre que c’est ce qui se déroulait au club échangiste Brigitte et Michel.

235.        Par conséquent, le tribunal se doit de conclure que cette preuve démontre d’une façon prépondérante et non contredite que ce qui se passait chez Brigitte et Michel semble ne pas outrepasser le seuil de tolérance de la société canadienne et contemporaine.

236.        Le tribunal doit constamment avoir à l’esprit que ce n’est pas à la défense de faire la preuve que ça n’outrepasse pas ce seuil, mais qu'il revient à la poursuite de prouver que ça outrepasse, et ce, hors de tout doute raisonnable.

237.        Le tribunal ne doit pas chercher dans la preuve de la défense, une preuve hors de tout doute raisonnable que ce qui se passait chez Brigitte et Michel n’outrepasse pas la norme de tolérance de la société canadienne et contemporaine.

238.        Le tribunal doit trouver dans la preuve de la poursuite, une preuve hors de tout doute raisonnable, que ce qui se passait chez Brigitte et Michel outrepasse la norme de tolérance de la société canadienne et contemporaine.

239.        Dans un premier temps, si la preuve de la poursuite n’est pas convaincante hors de tout doute raisonnable, le tribunal doit accorder le bénéfice du doute et acquitter les accusés.

240.        Dans un deuxième temps, si la preuve de la poursuite est contredite par la preuve de la défense et que cette preuve n’est pas contredite hors de tout doute par une contre preuve de la poursuite, le tribunal doit aussi accorder le bénéfice du doute aux accusés et les acquitter.

241.        Dans le présent dossier, la preuve scientifique et objective qui est faite par la défense est si abondante qu’on a le réflexe d’en faire une analyse critique et d’y chercher la preuve de la non culpabilité des accusés.

242.        Le tribunal se préoccupe avec raison que les clubs échangistes soient véritablement fréquentés par des échangistes authentiques et non pas par des “profiteurs”.

243.        La preuve faite par l’expert Campbell apporte la réponse et la solution à cette préoccupation du tribunal.

244.        En effet, il semble que le milieu échangiste partage cette même préoccupation et que ce milieu a même un mécanisme de respect par lequel ces “profiteurs” sont voués à l’échec s’ils ne sont pas d’authentiques échangistes : ils ne seront tout simplement pas acceptés dans le milieu échangiste tel qu’il appert aux pages 103 et 104 :

244.1    “ Il y a, dans ces milieux-là, une espèce de contrat tacite entre les personnes, que les personnes qui s'y rendent savent que, ça, ça peut arriver. Et les personnes qui s'y rendent vont être extrêmement sensi­bles au malaise qui peut émerger.

244.2    Alors, ma compréhension de l'échangisme dans un contexte comme ça, c'est que s'il y a un malaise, il y aurait des interventions qui seraient faites par les gens qui diraient non.

244.3    Si quelqu'un veut faire un genre de toucher qui est non voulu, la personne dirait non.  Et il y a comme un respect dans ce milieu-là parce que, évidemment c'est un milieu où c'est très important pour les personnes d'être acceptées par d'autres personnes.

244.4    Si quelque chose se passe, il y a comme une espèce de dynamique de groupe qui fait que les gens vont comme s'entraider et décider que, non, celui-là, là...  Mettons, on pense à quelqu'un qui arrive en état d'ébriété, puis qui commence à faire le fanfaron, ça se pourrait que les gens disent non, t'sais, on arrête, là.

244.5    Lui, il veut se masturber, là, puis on n'est pas d'ac­cord avec ce scénario-là.  Alors, là, tout pourrait arrêter, à ce moment-là.

245.        Et à la page 106 l’expert Campbell d’ajouter :

245.1    “ Mais la plupart du temps, il y a une supervision où il y a des personnes qui supervisent davantage puis s'ils voient que les règles ne sont pas respectées, bon bien la personne, on lui montre la sortie.”

246.        D’ailleurs, sur les vidéocassettes de la police on ne voit aucun de ces “profiteurs” en maraudage qui vient s’imposer en manquant de respect.

247.        Dans un véritable club échangiste authentique, on peut donc raisonnablement s’attendre à ce que les “profiteurs” ne soient tout simplement pas tolérés.

248.        S’il existe un endroit où on tolèrerait ces “profiteurs”, c’est que cet endroit ne serait pas un authentique club échangiste, mais plutôt une maison de débauche ou de prostitution.

249.        C’est pourquoi il faut que le tribunal dresse la liste des critères qui permettront d’identifier et de distinguer le club échangiste authentique du club qui se prétend faussement être un club échangiste.

250.        Le présent dossier revêt plusieurs aspects très particuliers qui en font un cas d’espèce sans précédent, notamment le fait que les avocats de la ville et la police admettent qu’il y a un vide juridique.

251.        En comblant d’abord ce vide juridique grâce aux normes établies par le présent jugement, on peut raisonnablement s’attendre à ce que l’usage du milieu échangiste fasse en sorte que, dans un deuxième temps, il deviendra plus facile de séparer l’ivraie du bon grain.

252.        Quant au caractère privé ou public des activités qui se déroulent dans un club échangiste tel que défini dans le sondage, l’expert Campbell témoigne de sa compréhension à l’effet que les lieux en question ont plutôt un caractère privé que public et à la page108 il témoigne ainsi :

252.1    Les clubs échangistes, par définition, à mon avis, c'est des clubs privés un peu comme un autre club où, par exemple, le Club des Mustang, les voitures, les véhicu­les Mustang.  Pour faire partie du club, faut avoir une Mustang, par exemple.

252.2    C'est sûr que c'est des clubs ouverts au public, mais où il y a des critères qui font que c'est pas n'importe qui, qui se présente là qui peut participer.

252.3    Un des critères, par exemple, c'est qu'il faut être un adulte.  Et un autre des critères, c'est qu'il faut respecter les règles du club.

252.4    Alors, dans ce sens-là, c'est un peu comme le Club St-Denis, par exemple, qui est un club où c'est pas n'importe qui, qui rentre s'il n'est pas membre.  Alors, c'est un club, en quelque sorte, privé et le public y a accès, mais selon certaines règles prédéter­minées.”

253.        Selon l’expert Campbell ce caractère privé découle non pas du nombre de personnes qui participent ou assistent à l’activité, mais découle plutôt de la partie de la question qui traite de l’aspect publique, tel qu’il appert aux pages 108 et 109 :

253.1    “Au paragraphe 9, on mentionne: "Toutes les activités sexuelles collecti­ves, c'est-à-dire à l'abri du regard du public ne désirant pas y assister, (inau­dible) y participer ou y assister."

253.2    Je crois qu'on tend plus vers (inaudible) privé que public par une phrase semblable?

253.3    Oui, oui, c'est beaucoup plus privé que public.”

254.        De la page 119 à 125, l’expert Campbell établit que les échangistes exercent de plus en plus ouvertement leur droit fondamental à la liberté d’association garanti par la Charte Canadienne des Droits et Libertés.

255.        Il existe un organe officiel qui les représente et qui est l’Association des échangistes du Québec (page 119) selon laquelle 500 personnes franchissent les portes des clubs échangistes chaque fin de semaine (page 120). Il existe 300 clubs échangistes en Amérique du Nord (page 121). Les échangistes ont maintenant des services spécialisés qui s’adressent à eux comme des agences de voyage, des hôtels (page 121),  des croisières (122) et des milliers de gens participent à ces activités (page 121) qui regroupent environ 5 % à 7% de la population adulte (page 121).

256.        Un autre exemple de tolérance est établi par le fait que dans les média, une émission sur l’échangisme, aussi connu, populaire et publique que “Claire Lamarche”, a démontré que “ Et dans la grande majorité des cas, les gens semblaient dire que ça les dérangeait pas.” (page 126-127)

257.        Comme l’a établi l’avocat de la poursuite quant aux vidéos pour adulte, la tolérance de la société canadienne contemporaine face à l’échangisme dépend du contexte, tel qu’il appert à la question 306 de la page 132

257.1    “Q1 Alors, je comprends que le contexte peut faire en sorte aussi de rendre quelque chose plus tolérable dépendam­ment de la situation, dépendamment du contexte ?

257.2    R Oui, oui.”

258.        Cette tolérance de la société canadienne est tellement grande quant à la sexualité explicite contenue dans ces vidéos, que tout le public peut même y avoir accès :

258.1    “ Et maintenant, on peut voir ça à la télévision, il y a des émissions, le soir où on voit, sur des postes de télévision publics, on voit des scènes sexuelles.

259.        Comment pourrait-on justifier auprès de la population canadienne et contemporaine, qu’elle ne pourrait pas voir en trois dimensions dans un club échangiste privé, ce que la population peut voir en deux dimensions à la télévision  publique ?

260.        Le visionnement de matériel pornographique à la télévision en privé ne devient pas publique parce que plusieurs millions de personnes regardent la même émission de télévision en même temps. De même, le fait que plusieurs personnes réunies dans une même pièce loin du regard du public qui ne veut pas y assister ou y participer, ne devient pas publique par le simple fait que plusieurs personnes sont en présence les unes des autres lorsqu’ils ont des relations sexuelles.

261.        Les activités sexuelles qui étaient péchés sous l’emprise de l’Église lorsque le but n’était pas procréatif, sont maintenant tolérées dans la société canadienne et contemporaine, même si le but est maintenant purement récréatif comme dans le cas des clubs échangistes :

261.1    “Alors, la sexualité a pris toute une proportion qui est plus récréative que strictement procréative.  Il y a un changement, aussi, de  ce côté-là.” (page 135)

262.        Le tribunal est donc à même de constater que l’évolution de la tolérance est un phénomène global, continu et progressif et que dans le cas d’accusations d’actes indécents, un juge doit prendre en considération les faits et le contexte le plus rapproché dans le temps des évènements à juger, et ceci en considération de la preuve faite par l’expert Campbell à la page 137 à l’effet que la société est plus tolérante quand il n’y a pas de dommages de créer et qu’il n’y a pas de victime :

262.1    “ Je pense qu'on va vers une société qui tolère certaines chose quand on croit que ça ne cause pas des difficultés psychologiques ou sexologiques ou une atteinte à la personne.  Je pense que, là on est capable d'être plus tolérants.”

263.        Le fait que dans la question du sondage D-7 utilise le mot “établissement” plutôt que le mot “résidence” rejoint la recommandation du rapport Fraser sur la prostitution au Canada dont parle l’expert Campbell aux pages 138 et 139 :

263.1    “Et donc cette équipe-là de gens qui étaient payés avec nos taxes se sont promenés un peu partout dans le Canada pour aller chercher toutes sortes d'informations.  On n'a pas pris des gens qui connaissaient rien.  On a pris des gens qu'on croyait qui pouvaient... je me souviens pas de la liste de noms, mais on indique dans le rapport qui sont ces personnes-là.

263.2    Et ces personnes-là ont rencontré plusieurs comités, des groupes d'inté­rêts.  Ils arrivent à une recommanda­tion où est-ce qu'on dit que les dispositions pénales relatives aux maisons de prostitution devraient être reformulées afin de ne pas empêcher des petits groupes de personnes d'exercer la prostitu­tion dans un local résidentiel et de ne pas empêcher les provinces d'auto­riser et de réglementer des petits établissements de prostitution occupant des locaux non résidentiels et employant des personnes adultes.

263.3    Ça, c'est une recommandation du comité.."

264.        La preuve qui est faite dans le présent dossier, démontre d’une façon prépondérante et non contredite que la société canadienne contemporaine est prête à tolérer des établissements échangistes où adultes avertis peuvent avoir des relations sexuelles en groupe dans un établissement qui leur est réservé, hors du regard du public.

265.        À la page 141 l’expert Campbell explique ainsi pourquoi le rapport Fraser a recommandé la création d’établissements :

265.1    “Je pense que dans le rapport Fraser, on a réalisé qu'un contrôle de la prostitution était probablement la meilleure chose qui pouvait arriver au Canada, d'une part pour protéger les prostitués contre les proxénètes et d'autre part pour avoir un meilleur contrôle sur la santé et proba­blement aussi un meilleur contrôle sur les impôts.

265.2    Je pense que le rapport Fraser, là, dans l'esprit, là, pour en avoir parlé dans des cours que j'ai ensei­gnés a l'université, l'esprit c'était:  Bien, si on peut pas gagner la bataille, vaut mieux peut-être, vaut mieux qu'on permette une structure.

265.3    Maintenant, est-ce que les Canadiens et les Canadien­nes sont dérangés par ça?  Je pense que la majorité des Canadiens et des Canadiennes ne souhaitent pas eux-mêmes participer dans des activités de prostitution.

265.4    Quand on leur demandait:  "Est-ce que, vous, vous souhaitez participer à ça?"  Je pense que la majorité dirait "Non".  Dans mon impression à moi, c'est que je pense que la majorité ne souffre pas à l'idée... ne souffrirait pas à l'idée de savoir que la prostitution se fait, dans ce pays-ci, avec un contrôle adéquat.

265.5    Moi, je pense que c'est ça que les Canadiens pensent.  Ça fait que s'ils savaient qu'il y avait un bon contrô­le, qu'il y avait des règles sanitaires, des règles de santé qui protègent la santé, je pense qu'on arriverait à des résultats semblables aux résultats qu'on a dans certains pays en Europe.

266.        Le tribunal a donc des motifs raisonnables à croire qu’une des meilleures façons de combler le “vide juridique” quant à l’échangisme tout en respectant la norme de tolérance de la société canadienne contemporaine est d’établir des normes s’inspirant du rapport Fraser et qui permettront d’assurer “un meilleur contrôle sur les impôts.”

267.        Le tribunal doit donc considérer que, si la société veut un “meilleur contrôle sur les impôts” de  ces établissements, c’est que ces établissements doivent nécessairement avoir un caractère commercial.

268.        Il serait contraire à la Charte des Droits et Libertés que de reconnaître le droit “juridique“ de ces établissements d’exister, si on ne leur donne pas en même temps le moyen économique d’exister.   

269.        Le tribunal se doit donc de prendre en considération que l’ensemble de ces faits tend à démontrer que la population canadienne contemporaine semble tolérer les clubs échangistes et que, par conséquent, leur existence ne semble pas dépasser le seuil de tolérance de la société canadienne contemporaine puisqu’aucune preuve n’a été faite que la société canadienne contemporaine réagissait significativement contre les échangistes.

270.        Le tribunal peut voir que la tolérance face aux échangistes, ressemble à la tolérance et à la compréhension de la société canadienne et contemporaine par rapport à l’homosexualité.

271.        Cette tolérance face à l’homosexualité a entraîné la décriminalisation de l’homosexualité et sa légalisation pleine et entière. Aucune loi au Canada n’interdit l’échangiste et pourtant les échangistes se retrouvent devant les tribunaux de juridiction criminelle avec le fardeau de démontrer qu’ils ne font rien d’illégal. On leur impose ainsi le fardeau de prouver leur innocence, ce qui est contraire aux règles du fardeau de la preuve.

272.        Tout comme pour l’homosexualité, la question n’est pas de savoir si l’échangisme est légal ou illégal, mais de déterminer, selon la preuve au dossier, dans quels contextes et dans quelles circonstances, il faut encadrer les clubs échangistes pour respecter le droit fondamental à la liberté d’association des échangistes, compte tenu de la tolérance que démontre la société canadienne et contemporaine.

MICHEL CAMPBELL LE 1 OCTOBRE 2002

 

273.        À la page 13 il confirme au tribunal que l’expression « club échangiste » revêt un caractère privé dans le cadre d’un « contrat social ».

274.        À la page 14 et 15 il illustre le caractère privé d’un club échangiste en parlant de filtre qui empêche aux gens non intéressés de voir ce qui s’y passe.

275.        À la page 16 il souligne que c’est important que les gens sachent à quoi s’attendre quand ils vont dans un club échangiste

276.        Aux pages 18 et 19 il précise l’étendue de la définition élargit de l’échangisme et exprime le besoin des échangistes d’avoir des locaux ailleurs qu’à leur résidence mais ayant un caractère privé.

277.        Aux pages 21 et 22 il précise que le niveau de tolérance de la société canadienne sur le phénomène sexuel serait à peu près le même en 2002 comme il l’était en 1997. Par conséquent, le tribunal peut déterminer le caractère contemporain des normes en fonction de la jurisprudence de cette période et non pas la jurisprudence des années 80.

278.        Aux pages 22 à 24 il établit  les 10 règles du code d’éthique de l’échangisme et plus précisément à la réponse à la question 57 :

278.1    "Règle 1:  Soyez courtois."

278.2    Règle 2:  Soyez amicaux."

278.3    "Règle 3:  Hygiène et propreté."

278.4    "Règle 4:  Respectez les sentiments des autres."

278.5    "Règle 5:  Ne soyez pas pressants."

278.6    "Règle 6:  Ne faites que ce qui vous apporte du plaisir."

278.7    "Règle 7:  Comment et pourquoi dire non."

278.8    "Règle 8:  Alcool et drogue."

278.9    Comme par exemple, là, dans cette rubrique-là du code d'éthique, c'est qu'on dit que:

278.10"La plupart des gens d'entre nous ne font pas usage de drogue même si certains boivent avec modération.  Un bon moment, une boisson peut vous aider à vous re­laxer.  L'abus peut handicaper vos possi­bilités physiques autant qu'offenser ou détourner les autres personnes de vous.  Si vous avez besoin d'être saouls pour participer, vous n'avez pas choisi le bon mode de vie."

278.11"Règle 9:  Pratique le sexe sans risque."

278.12"Règle 10:  Amusez-vous."

279.        De la page 24 à la page 28 l’expert Campbell établit en quelque sorte que la présence de ces règles et leur application vont accroître le niveau de tolérance de la société canadienne contemporaine et constituent des moyens ou des filtres qui permettraient de mieux reconnaître les échangistes authentiques qui adhèrent à la philosophie échangiste et de les distinguer des profiteurs.

280.        De la page 24 à la page 27 le témoignage de l’expert Campbell permet de conclure que la présence de frais d’adhésion et l’existence d’une carte de membre sont d’autres moyens pour atteindre le même but :

280.1    “Je pense pas que ça modifierait beaucoup le fait de savoir que quelqu'un qui demande des frais d'adhésion pour avoir une carte de membre ou encore des frais pour rentrer dans un établissement — mettons la porte, par exemple — je pense pas que ça l'influencerait beaucoup le seuil de tolérance.”

280.2    Et je pense que les frais d'adhésion au club ont deux (2) objectifs:  discriminer entre les bons membres potentiels et les mauvais membres et aussi d'informer les membres de ce qui se passe et des règles de la place, donc le code d'éthique, par exemple.”

281.        À la page 26 il réitère l’importance d’informer les gens pour ne pas risquer qu’ils soient offusqués, (d’où l’importance et l’utilité d’avoir une affiche extérieure ainsi que des affiches à l’intérieur pour bien informer les gens).

282.        Aux pages 26 et 27 il  réfère au terme « club », qui donne un caractère privé à un endroit comme Brigitte et Michel, puisque ce mot inclus le concept que c’est à l’abri du regard du public et que cet endroit est réservé aux échangistes et que de ce fait le seuil de tolérance atteint un niveau plus élevé, tel qu’il appert de la réponse aux questions 61 et 62 et 67 :

282.1    “Puis je pense que dans l'esprit du sondage qui a été fait avec les Canadiens et les Canadiennes, je pense que implicitement, on parlait de club et on parle d'un endroit où c'est à l'abri du regard du public et c'est un établissement prévu à cette fin qui leur est réservé.”

282.2    “Je pense que dans le sondage, ce qui est important, c'est ça, c'est réservé pour ces gens-là.  C'est pas quiconque qui peut entrer comme ça..”

282.3    “C'est réservé à des échangistes?”

282.4    “Oui, les échangistes. Dans la mesure où le public canadien, d'après votre réponse, si j'ai bien compris votre réponse, c'est que le public, l'observateur canadien, donc le public canadien, dans la mesure où il est rassuré, entre guillemets, de l'activité où elle s'exerce et des conditions dans lesquelles elle s'exerce est réservé aux échangistes, le seuil de tolérance a un niveau élevé ?”

282.5    “Oui.” 

283.        Aux pages 31 et 32  il affirme que « une activité orgiaque, une orgie » outrepasseraient le seuil de tolérance mais il ne définit pas ce qu’il entend par orgie.

284.         Il nuance son affirmation en disant que si cette orgie a lieu; « dans un endroit où le public y a accès, mais avec un filtre et qui sont bien informés, je pense que ce serait serré comme statistique, là, ce serait au tour de peut-être cinquante deux (52) , cinquante trois (53), c’est très serré.  Je pense que la notion qui serait importante c’est que les gens soient bien informés dans quoi ils s’embarquent ». (d’où l’importance d’avoir une enseigne à l’extrérieur de l’établissement et le fait que la publicité de ces établissements indiquent clairement qu’il s’agit d’activités échangistes).

285.        Le tribunal doit quand même retenir que 52% et 53% sont des pourcentages qui démontrent tout de même qu’une majorité de canadien tolérerait l’orgie dans une certaine mesure et que tout dépend de la façon dont les gens seraient informés.

286.        Contrairement à ce que l’on pourrait croire à première vue, le mot orgie ne réfère pas au nombre de personnes mais au caractère excessif d’une activité.

287.        Puisque l’expert ne donne pas définition objective de l’orgie, il faut s’en remettre au sens commun défini par un dictionnaire contemporain pour en comprendre le sens.

288.        À la page 1799 de l’édition 2002 du « Petit Robert » on donne trois définitions objectives du mot orgie tel qu’il appert à la copie de la page jointe en annexe :

288.1    « Fêtes solennelles en l’honneur de Dionisos à Athène, de Baccus à Rome.  bacchanale . Chants et danses de Bacchantes.

288.2    Partie de débauche, où les excès de table, de boisson, s’accompagnent de plaisirs grossièrement licencieux . Repas long et bruyant copieux et arrosé à l’excès. Beuverie, ripaille, soûlographie.

288.3    Orgie de : usage excessif de «ce qui plaît ». Excès.

289.        Comme le tribunal se doit donc de comprendre que ce qui pourrait affecter le niveau de tolérance de la société canadienne quand on parle d’orgie, ce n’est pas le nombre de participants mais c’est le fait qu’il y aurait un excès comme une ‘’Beuverie, ripaille, soûlographie’’.

290.        En ce sens, l’orgie correspond davantage au manque de respect qu’on retrouve dans un ‘’Free for all’’ tel que le tribunal le définit à la question 209 de la page 76 de la transcription du 1 octobre 2002 :

290.1     ‘’Si c’est orgie, c’est accessible à tout le monde sans trop de critère puis et caetera ?’’ ce à quoi l’expert Campbell a répondu : ’’Exactement…’’).

291.        Or, le tribunal a pu voir les vidéos montrant ce qui se passait dans un club échangiste comme chez Brigitte et Michel et nulle part il n’y a d’excès comme des gens bruyants en état d’ébriété,  irrespectueux, excessifs, soûls ou grossiers.

292.        Puisque l’expert Campbell déclare à la question 99 que l’on verra un peu plus loin que ce qui se passait chez Brigitte et Michel rencontre le niveau de tolérance et la définition du rapport CROP, le tribunal se doit de conclure que ce qui se passait chez Brigitte et Michel ne constituent pas des orgies.

293.        Comme le sondage D-7 établit que la société canadienne tolère les relations sexuelles en groupe, sans égard au nombre de participants,  il faut conclure que les canadiens sont d’accord avec le fait que ces relations sexuelles se déroulent en groupe et que s’ils avaient été en désaccord avec ce concept, ils avaient le choix de dire qu’ils étaient en désaccord avec l’idée que les relations sexuelles se déroulent en groupe.

294.        Par conséquent le tribunal n’a pas à se demander à partir de combien de personnes on se trouve en présence d’une orgie. Le tribunal doit plutôt voir si dans la preuve il a été démontré hors de tout doute raisonnable que ce qui se déroulait au club échangiste Brigitte et Michel n'est pas toléré.

295.        À la page 33 l’expert Campbell indique au tribunal que dans l’esprit des canadiens et des canadiennes la définition du club échangiste correspond à une espèce d’entente, à un contrat, que l’expert appelle « filtre » comme autre moyen pour s’assurer que les clubs échangistes seront fréquentés par des adeptes authentique de la philosophie échangiste.

296.        À la page 37  l’expert témoigne à l’effet que l« ce qui s’est passé au club chez Brigitte et Michel » « rencontre la définition et la tolérance que l’on retrouve dans le rapport de CROP » tel qu’il appert de la réponse suivante question Q99 :

296.1    Dans le présent dossier, là, ce qui s'est passé au Club de Brigitte et Michel, là, vous avez vu les vidéos de la police, là, ce qui se passait, là, avec toutes les indications qu'on demandait, montant d'argent, qu'il y avait des feuilles de réservation, qu'il y avait des célibataires, qu'il y avait des couples, qu'il y avait des fellations, et caetera, ce qui a été fait dans ce dossier-ci, est-ce que, selon vous, dans votre compréhension des choses, comme dit Monsieur le Juge, ça rencontre la définition et la tolérance qu'on retrouve dans le rapport de CROP?

296.2    Oui.

297.        Donc,  le tribunal n’a pas à se demander si le nombre de personnes ou la notion d’orgie doivent être pris en considération pour juger ce qui se passait chez Brigitte et Michel était conforme aux normes de tolérance canadienne contemporaine, puisque ce qui se passait chez Brigitte et Michel correspond à ce qui est toléré dans la société canadienne et contemporaine autant selon le sondage D-7 que selon l’expertise D-12, D-12.1, D-12.2 et selon le témoignage de leurs auteurs.

298.        D’ailleurs, à la page 32, le Dr Michel Campbell parle d’une orgie à 6 personnes, démontrant ainsi qu’une orgie n’est pas une question de nombre de participants.

299.        Comme on le verra plus tard à la page 47, le Dr Campbell indique que    « même à quarante (40) personnes dans le contexte qui prévaut chez Brigitte et Michel c’est quelque chose qui est toléré dans la société conformément au sondage ».

300.        À la page 40 le Dr Michel Campbell revient sur la notion de contrat social et il suggère au tribunal d’autres moyens pour s’assurer du caractère authentique des clubs échangistes en parlant de « règlements qui sont expliqués ».

301.        À la page 40 l’expert Campbell indique au tribunal qu’un « membership »  constitue également un autre moyen pour filtrer les profiteurs et s’assurer de l’authenticité des gens qui fréquentent un club échangiste en lui donnant son caractère « semi-privé » qui correspond à ce qui se passait chez Brigitte et Michel « à l’abri du regard du public ».

302.        Le tribunal doit se rappeler que tous ces moyens, comme le membership, les affiches extérieures pour que les adultes soient avertis de ce qui se passe à l’intérieur, les frais d’adhésion, etc., viendront combler ce vide juridique dans lequel se trouvaient les clubs échangistes en 1998 et 1999 (et encore en 2003)  mais qu’à cette époque, aucun sondage n’existait et que par conséquent on ne peut pas tenir rigueur à Brigitte et Michel de ne pas satisfaire à tous et chacun des critères qui viendraient combler ce vide juridique et qui ne pourront être valables et exigibles que pour le futur.

303.        À la page 41 l’expert Campbell répond positivement au juge que les répondants du sondage ont compris par le mot « établissement » qu’un club échangiste n’était pas une résidence  et qu’une somme d’argent  allait de soi .

304.        Aux pages 46 et 47 l’expert Campbell ne laisse planer aucun doute quant au fait que l’argent demandé par Brigitte et Michel pour les frais d’opération respectait la norme de tolérance.

305.        À la page 52 l’expert Campbell parle de « faiblesse » du questionnaire et de « confusion » mais le tribunal ne peut très certainement pas conclure que la question était inadéquate puisque l’expert Gauthier qui a rédigé la question est celui qui a été reconnu comme expert quant à la formulation de la question.

306.        La question ayant été répondue, il faut conclure que les gens l’ont compris qu’on leur demandait s’ils toléraient les relations sexuelles entre « adultes avertis et consentants en groupe ».

307.        Cette question est formulée pour décrire ce qui se passait chez Brigitte et Michel où il y avait des célibataires et des couples et par conséquent le sondage démontre que les relations sexuelles en groupes, incluant des couples et de célibataires, sont tolérées dans les circonstances prévalant chez Brigitte et Michel.

308.        Si on avait posé la question en référant uniquement à des relations sexuelles entre couples, contrairement à ce qui se passait chez Brigitte et Michel, la réponse n’aurait pas  été concluante en fonction de la preuve dans le présent dossier.

309.        Si on avait voulu savoir ce que les gens pensaient de l’échangisme dans son sens restreint,  c’est à dire limité au couples,  la question l’aurait spécifiquement indiqué, mais ce n’était pas ce qui était demandé, car le but du sondage était de vérifier le seuil de tolérance de la société canadienne contemporaine face à l’échangisme défini dans son sens large, puisque c’est ce qui correspond à ce qui se passait chez Brigitte et Michel.

310.        Ce qui était demandé  c’était de savoir si la société canadienne contemporaine tolérait ce qui se passait chez Brigitte et Michel où il n’y avait pas que des couples et où il y avait plutôt de l’échangisme au sens large de la définition donnée par l’expert Campbell dans les deux derniers paragraphe de la page 4 de son expertise D-12.

311.        Comme l’expert le dit à la page 57, si on avait voulu savoir si la société canadienne contemporaine tolérait les orgies, il aurait fallu poser la question relativement aux orgies.

312.        Toutefois, tel n’était pas le but visé puisque le caractère  « d’excès » qui caractérise la définition du mot orgie, ne correspond pas à ce qui se passait chez Brigitte et Michel

313.        Aux pages 58 et 59, l’expert Campbell témoigne à l’effet qu’en considération de la disposition des lieux décrits selon le plan P-13.2, que ce qui se passait chez Brigitte et Michel « rencontre effectivement le seuil de tolérance de la société canadienne » et que « ça ressemble beaucoup au fameux filtre ou situation, où par exemple il y a des places réservées pour des activités sexuelles ».

314.        À la page 59, l’expert Campbell établit d’une façon non-contredite  que le plan P13.2 démontre que l’endroit correspond à la notion « semi-privé » dans le contexte mis en preuve et il ne laisse aucun doute à ce sujet lorsqu’il affirme :  « c’est semi-privé pour deux (2) raisons : à cause de l’architecture de la place, si je peux m’exprimer ainsi, mais surtout à cause du fait que les gens sont bien avisés de ce qui se passe ».

315.        À la page 60,  l’expert Campbell indique au tribunal que le fait qu’on affiche «Échangistes», pourrait être un moyen pour s’assurer qu’il s’agit d’un club échangiste « authentique » qui le distinguerait  « d’un club au coin de la rue »  qui pourrait être plutôt un bordel déguisé.

316.        À la page 63 ,  l’expert Campbell à qui on présente la page  83  du magazine P-9 où Brigitte et Michel  incluaient les « célibataires » et par ce fait, ce qui se passait chez Brigitte et Michel correspond d’avantage à la notion plus large de l’échangisme que l’on retrouve dans le terme anglais « Lifestyler ».

317.        À la page 64, l’expert Campbell  maintient les conclusions de son rapport  à l’effet que ce qui se passait chez Brigitte et Michel respecte les normes de tolérance de la société canadienne contemporaine, même si les activités pour adultes chez Brigitte et Michel incluaient à la fois les couples et des célibataires comme l’indique l’annonce du 20 août 1999  contenue dans la pièce P-8.1.

318.        À la page 65, l’expert Campbell confirme la valeur probante du caractère contemporain du sondage fait en 2002 pour démontrer la tolérance contemporaine pour les événements de 1999.

319.        À la page 76, le tribunal indique : ‘’On tourne toujours autour de la même idée, dans le fond, plus ce sera privé, plus c’est acceptable; plus c’est public, moins c’est acceptable.’’

320.        Or, le sondage  D-7 ainsi que le témoignage de l’expert Gauthier démontrent  d’une façon prépondérante et non contredite qu’une majorité de la société canadienne contemporaine tolère les relations sexuelles explicites lorsque ‘’ces activités se font à l’abri du regard du public ne désirant pas y assister ou y participer’’.

321.        Puisque la preuve démontre que ce qui se passait chez Brigitte et Michel se faisait ‘’à l’abri du regard du public ne désirant pas y assister ou y participer’’ et, en ce sens, revêt un caractère ‘’privé’’, le tribunal doit donc conclure en toute logique, que les activités qui se déroulaient chez Brigitte et Michel n’outrepassent pas la norme de tolérance de la société canadienne contemporaine.

 

PAR ME BERNARD CORBEIL , MONTRÉAL, le mardi, 28 janvier, 2003,

 

 

 

 

 

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